Yann Moix et Le Figaro condamnés !

Yann-Moix-Podium.jpgUne utopie pourrie… (suite et fin)

Résumé des chapitres précédents : Yann Moix en vadrouille à Avignon à l’été 2009, lit dans la gazette d’Utopia le texte concernant le film Le temps qu’il reste et, se laisse aller le lendemain dans Le Figaro à un texte d’humeur. Une association communautaire d’Avignon, encouragée par l’article de Moix intente un procès à Utopia Avignon pour « incitation à la haine raciale ». L’association est déboutée, mais tous les Utopia réalisant ainsi la portée d’un tel article assignent Moix et le Figaro en justice pour « délit d’injure publique ». Bernard Henri Levy, Le Crif, l’UPJF (l’Union des Patrons Juifs de France)… soutiennent Moix et relaient son texte. L’audience se tenait le 14 septembre 2010 à la 17e chambre correctionnelle à Paris et le jugement a été rendu le 19 octobre. Nous apprenons ce jour que ni Moix, ni Le Figaro ne feront appel.

Pour une surprise, c’est une surprise et on n’en croyait pas nos oreilles quand Thierry Levy, notre avocat nous a appelé pour nous donner le jugement en date du 19 octobre. Alors que depuis des lustres tous ceux qui critiquent peu ou prou la politique d’Israël se voient impunément traiter des pires noms d’oiseaux par une poignée d’allumés bien en cour dans les médias qui s’érigent en défenseurs inconditionnels du gouvernement le plus brutal que ce pays ait connu depuis longtemps… Il est donc reconnu par la justice qu’il n’est pas admissible, même en étant copain avec BHL, le Crif et quelques autres, de trainer dans la boue en toute impunité, les quelques contrevenants à la pensée unique.
Certes la sanction n’est pas terrible, mais sa modicité et la subtilité du jugement nous évitent des frais d’appel : 500 euros avec sursis pour Moix et rien pour Le Figaro condamné néanmoins, mais « condamné dispensé de peine » car « il sera tenu compte de la publication de l’article de Moix en page Opinions qui a pour vocation de promouvoir l’échange de points de vue sans engagement éditorial de la rédaction. » Une variation sur le thème du « responsable mais pas coupable » bien connu. Les deux doivent tout de même verser 3000 euros aux Utopia pour frais de justice et chaque plaignant recevra 1 euro symbolique sans que les parties civiles, dont la plainte est donc reconnue légitime, n’ait le droit à des excuses publiques… donc, Le Figaro n’aura pas à passer un communiqué d’Utopia, même pas dans la page Opinion supposée « contribuer à la diffusion d’opinions de tiers » mais néanmoins réservée aux habituels collaborateurs du Figaro…

Yann-Moix.jpgBref ! Rejetant d’un revers la demande des prévenus de l’irrecevabilité de la plainte d’Utopia : le jugement conclue que les gens anonymes d’Utopia  ne le sont pas autant que ça puisqu’il est tout à fait possible de les trouver dans l’annexe du Palais des Papes à Avignon, dans l’Église Saint Siméon à Bordeaux, etc. le tribunal a donc déclaré Francis Morel (représentant Le Figaro) et Yann Moix « coupables de délit d’injure envers particuliers », retenant plus particulièrement l’expression « ce sont les Brazillach d’aujourd’hui » : « eu égard à son sens et à sa portée, celle-ci ne saurait trouver de justification ni dans la qualité d’écrivain de l’auteur, ni dans le registre polémique où il entend se situer et pas plus dans le style “entre deux guerres” susceptible de caractériser son billet, sauf à dégrader gravement le niveau du débat public par des incitations à la haine et à la proscription intellectuelle de ses contradicteurs. »

Le tribunal remarque avec finesse et s’en étonne peut-être un peu « que les parties civiles se soient abstenues de poursuivre la fin du texte de Yann Moix où elles se voient pourtant accusées d’être le visage nouveau de l’antisémitisme contemporain ou de vouloir en finir avec tout ce qui est juif dans l’économie du monde »… On peut le dire, maintenant que le jugement est rendu… si nous n’avions pas relevé cette partie du texte de Moix, c’est que nous n’étions pas vraiment surs de trouver chez les juges la subtilité et l’impartialité dont ceux-ci ont su faire preuve ici, et nous préférions insister sur les injures les plus évidentes, après avoir constaté dans d’autres jugements que ceux qui s’étaient plaints d’avoir été appelés « antisémites » n’avaient jamais été reconnus insultés, soit que l’injure soit devenue d’une extrême banalité, soit que le climat autour des prétoires et des médias ne se prête pas à un débat serein dès qu’on agite certains mots. L’expression « Brazillach d’aujourd’hui » nous semblant désigner l’expression extrême de l’antisémitisme, le reste du texte n’était au fond qu’une redite.

On ne saurait trop vous inciter au passage à lire les bouquins écrits par Thierry Levy qui, en sus d’être un remarquable (euphémisme) avocat est aussi un passionnant écrivain. Sur le site du Monde Diplomatique, à lire aussi sur son blog l’article d’Alain Gresh sur l’affaire Utopia-Moix.