LA CASA MUDA (The silent house) par son réalisateur...

LaCasaMudaComment est né le projet ?

De mon envie de réaliser un long métrage, après les formats courts auxquels je suis habitué, et de la passion de mon associé Gustavo Rojo pour les films d’épouvante. Nos collaborateurs sur le film sont les mêmes que ceux qui travaillent avec nous dans la publicité, sur les courts-métrages et sur les clips musicaux. Par exemple, je connais Pedro Luque, le directeur de la photographie, depuis l’École de Cinéma, et nous travaillons ensemble depuis plus de 8 ans. Nous partageons le même goût du risque, sur chaque projet. LA CASA MUDA a été tourné en 4 jours avec un budget de 6000$, quatre acteurs et une maison, avec pour seul but de créer une tension et de la peur chez le spectateur.


Quelle histoire a inspiré le film, et comment la connaissiez vous ?

C’est une sorte de légende urbaine dont nous avons entendu parler, nous avons enquêté sur cet événement, mais n’avons pas trouvé d’information concluante. C’est pourquoi nous avons souligné que le film est « inspiré » de faits réels, et non « basé » sur des faits réels. À partir des informations que nous avions recueillies, nous avons imaginé des hypothèses sur les 80 dernières minutes des corps qui ont été retrouvés. La légende en elle- même est très simple : dans un petit village, des corps mutilés ont été retrouvés dans une maison, accompagnés d’une série de photographies plutôt inquiétantes. C’est un fait divers des années 40 qui n’a jamais été élucidé.


Pourquoi ce choix du plan séquence unique ? L’appareil photo Canon que vous avez utilisé a-t-il permis de contourner des difficultés jusqu’alors insurmontables sur un tel projet ?

Quand mon producteur et ami Gustavo Rojo m’a proposé de réaliser THE SILENT HOUSE (LA CASA MUDA), nous savions tous les deux que le film devait avoir quelque chose de conceptuel, qu’il offre une expérience nouvelle. Je lui ai suggéré le principe du plan séquence afin d’explorer en temps réel les peurs les plus élémentaires que n’importe qui peut avoir, dans sa propre maison, dans la profondeur de la nuit : « la peur en temps réel », sans éllipse temporelle ni géographique. Il s’agit simplement de ressentir les émotions des personnages comme s’il était question de celles de n’importe quel spectateur. L’appareil photo nous a beaucoup aidés car il avait une grande sensibilité à la lumière, il était suffisamment léger et petit pour nous permettre de nous déplacer dans chaque recoin de la maison et ainsi réussir les cadres que nous avions planifiés.


Quel a été le travail de préparation du tournage ?

Nous avons fait un storyboard précis, découpé minute par minute, avec l’équipe de photographie et de réalisation. Nous avons effectué beaucoup d’essais avec les caméras et avec les acteurs. La préparation a surtout consisté à prévoir le pire, et à organiser la logistique en fonction. Car malgré les deux mois de préparation, les problèmes sur le tournage se sont multipliés, des projecteurs qui se voyaient, des imprévus divers, et il fallait chaque fois tout recommencer ! Le travail sur le son est particulièrement soigné. Le son a été un véritable casse-tête car l’équipe technique se déplaçait sans cesse pour accompagner les acteurs et les bruits se multipliaient. L’équipe de post-production a fait un gros effort pour retirer ces sons parasites ainsi que les indications que je donnais durant le tournage, et pour peaufiner les ambiances. La musique est également fondamentale parce qu’elle accompagne tout le parcours du personnage principal, souligne ses émotions, mais de façon minimaliste, parfois presque indécelable.


Quel est le point de vue de la caméra dans le film ?

On a voulu que le spectateur prenne le personnage par la main dès les premières images. Nous accompagnons Laura dans ses frustrations et ses sensations, mais pour ce faire nous n’avons pas voulu tomber dans le plan subjectif, potentiellement interminable et un peu trop évident. C’est pourquoi nous avons choisi de raconter son parcours émotionnel de plusieurs manières. Parfois, on laisse simplement la caméra prendre ses distances et rester silencieuse, afin de rendre compte de sa solitude dans cette immense maison. A d’autres moments, la caméra court nerveusement à ses côtés, pour mieux transmettre son désespoir dans la fuite. Elle peut aussi se rapprocher de Laura jusqu’au gros plan pour souligner la peur dans son regard.


Les dernières scènes du film semblent délibérément confuses et peuvent induire le doute chez le spectateur…

Pour certains, le twist final est controversé, pour d’autres, il comporte quelque chose de gratifiant. Personnellement, j’adore le dénouement parce qu’il dépeint de façon fidèle les relations âpres et confuses entre les personnages. Aucun d’entre eux n’est innocent. Ils sont ambigus dans leurs désirs et leurs intentions vis à vis des autres, assez émotifs, probablement un peu tricheurs, certainement fragiles et évidemment perturbés. Beaucoup de ces traits de caractère sont inclus dans le film, mais ils sont repris et davantage détaillés à la fin. Les personnages sont piégés dans un labyrinthe épousant la forme d’une maison qui ouvre ses portes et fait apparaître souvenirs et malheurs cachés.


Le film doit-il être considéré comme un divertissement pur, ou le spectateur peut-il lire un message entre les lignes ?

Nous avions deux objectifs : divertir et effrayer. Je pense que tous les deux sont atteints, à différents niveaux et pour des publics différents. Le film n’est évidemment pas une simple accumulation de rebondissements, il aborde des sujets divers, notamment sur les liens qui se tissent entre les générations. En première lecture, le film raconte une histoire simple, mais à la seconde vision, on découvre de nouveaux détails qui révèlent un fond plus complexe.


Comment définiriez-vous les relations entre les personnages ? Que nous disent-ils de la société contemporaine ?

Leurs relations se définissent de façon presque immédiate au début du film, à travers la distance physique qui les sépare, les silences… Le fossé générationnel est évident entre les personnages. Ce fossé devient de plus en plus marqué dans la société actuelle, à travers la solitude que choisissent certains adolescents ou même adultes, qui préfèrent s’enfermer dans leurs propres convictions, suivre leurs propres règles, plutôt que d’affronter la vie en communauté.


Aimez-vous les films d’horreur ? Aviez-vous des influences pour ce film ?

J’apprécie, mais je ne suis pas un fan. La référence du cinéma d’épouvante pour moi serait SHINING de Stanley Kubrick. Je ne revendique pas vraiment d’influence, mais j’ai évidemment beaucoup regardé de films d’horreur pour me familiariser avec les règles du genre. Il ne s’agissait pas de refaire un énième film ni de réinventer quelque chose, car beaucoup de films ont déjà été faits, beaucoup de très bons films. Ce qu’on a essayé de faire, c’est expérimenter à l’intérieur de ce genre. Des films comme REC ou LE PROJET BLAIR WITCH ont ouvert une voie et j’espère que THE SILENT HOUSE (LA CASA MUDA) s’inscrit dans cette lignée.


Par rapport à la version présentée à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes, une séquence a été ajoutée après le générique de fin.

J’ai choisi d’ajouter cette séquence pour illustrer l’ambivalence de Laura, enrichir son portrait et ajouter une tonalité. Cette séquence ne justifie pas ses actes passés, mais elle permet de faire apparaître d’autres facettes du personnage. Et elle y vit un sentiment de libération à la fois nécessaire pour elle et onirique dans sa manifestation.

CasaMuda

Enfant, une nuit, j’ai entendu un bruit bizarre qui venait de la mezzanine de ma maison, un bruit sourd qui me paralysa complètement. Tous mes sens se sont mis en éveil pendant quelques secondes qui m’ont paru des heures. J’essayais de me convaincre qu’il ne s’agissait que du vent faisant claquer une fenêtre. J’aiguisais mon audition et j’essayais de retenir ma respiration pour retrouver le silence. C’est une simple anecdote, mais je m’en souviens avec force, parce que dans ma mémoire c’est la première fois que j’ai ressenti une peur différente, une peur à l’état brut. THE SILENT HOUSE (LA CASA MUDA) résulte de cette expérience vécue de la peur en temps réel, transposée au cinéma d’épouvante. Nous avons choisi de raconter cette histoire en un seul plan séquence pour faire naître des sensations identiques à celles provoquées par un grincement étrange dans une maison, ou par l’émotion suscitée par un grave accident de voiture qui se produit à côté de soi, sans ellipse ni altération du temps au moment du montage. J’ai ressenti la nécessité de raconter une histoire sans que le spectateur soit trompé par une falsification temporelle. Il ressent la peur des personnages à l’écran de la même façon qu’il vit sa propre peur. Ce n’est ni un exercice de style, ni le challenge d’un excentrique. C’est simplement la forme de narration la plus honnête que j’ai trouvée pour transmettre mes peurs les plus élémentaires, en essayant de créer un langage cinématographique spécifique avec la fonction « film » d’un simple appareil photo, dont le poids et la taille nous permettait de bouger extrêmement facilement. THE SILENT HOUSE (LA CASA MUDA) est tiré d’une histoire vraie, celle d’un crime datant des années 40 dans un petit village de campagne. J’ai entendu cette histoire lorsque j’étais adolescent et elle a retenu mon attention à cause de certains détails marquants, comme les traces de mutilation ou une collection de photos prises avec un Polaroid. Lorsque nous avons commencé à enquêter, nous n’avons pas trouvé d’information significative dans les documents de police de l’époque. Mais le peu d’informations que nous avions contenait les ingrédients de base du film d’épouvante, nous avons réussi à visualiser très clairement l’événement tel qu’il avait pu se produire. Nous avons tout de suite pensé qui nous devions nous concentrer sur les 80 dernières minutes des victimes, en explorant la tension et les circonstances qui ont abouti à ces meurtres brutaux. Les histoires font naître des sensations différentes chez moi. Celles qui réussissent à me déranger ou à me troubler sont celles que j’apprécie le plus. Je ne suis pas attaché aux films d’horreur dans ce qu’ils ont de plus sanglant. Avec THE SILENT HOUSE (LA CASA MUDA), j’ai eu envie de faire surgir des émotions en m’essayant à une expérience cinématographique différente, avec un objectif central : faire passer des sentiments. Avec cette réalisation, j’espère avoir approché au mieux cette expérience pendant laquelle j’ai retenu ma respiration pour la première fois, cette nuit où je n’arrivais pas à dormir.

GUSTAVO HERNÁNDEZ

Commentaires

1. Le dimanche, septembre 25 2011, 01:20 par Gaëtan

Le début du film me laissait dubitatif en me disant que c’était un film de plus dans une maison hantée. Mais l’intrigue m’ a intéresser dans le sens où, je m’ imaginais dans la maison à la place de Laura. J’ apprécie de terminer un film en me posant pas mal de questions et laisser la place à l’imaginaire qui reste personnel à chacun. Commentaire suite à une première visualisation.

2. Le mercredi, septembre 28 2011, 23:00 par Jeremy

Merci Gaëtan pour ton commentaire. J’avoue que le film m’a fait le même effet, c’est en effet un film de plus dans une maison hantée et c’est bourré de références, mais c’est aussi un film très efficace avec cette petite dose de malsain supplémentaire qui apparaît à la fin et qui m’avait scotché (quand j’avais vu le film en festival, le réalisateur avait coupé son film au générique, il n’a rajouté que plus tard cette dernière scène qui explique un peu plus le personnage de Laura et que je trouve un peu de trop).
Du coup j’en profite pour te dire que nous organisons le 31 Octobre prochain une Nuit Fantastique à Utopia Tournefeuille, dès 21h, avec 5 films dont 1 surprise, un DJ pour combler les interséances et un buffet Halloween organisé par le bistrot… On est en train de finir de choisir les films, donc plus d’infos dans la prochaine Gazette et très bientôt sur le site…

3. Le lundi, août 13 2012, 22:44 par amateurdefilm

Dès les premiers instants j’ai su que j’allais detester le film … cependant ayant payer pour le regarder jai tout dememe continuer le visionnement et mon opinion tout au long du film n’a pas évolué. Le film comportait des longueurs et l’intrigue n’était pas captivante. Je n’ai ressenti aucune peur et les acteurs n’avaient pas plus l’air d’en ressentir une ! Un autre film très décevent qui ne raconte pas d’histoire et qui n’abouti a rien … Le dénouement est trop vague … J’aurais au moins voulu connaitre la vrai histoire … ou du moins une histoire inventée mais une vrai fin merde !!!!