Fiscalité, la fuite des cerveaux…

Pop_corn-Montebourg.jpgAlors que le gouvernement Ayrault dépense sans compter (1 million d’euros) à Notre Dame des Landes pour taper sur ses compatriotes (« minable », vous avez dit « minable » ?), que les salariés de Sanofi et d’ArcelorMittal ne voient toujours pas l’ombre d’une solution poindre pour les sauver des prédateurs de la finance, Jérôme Cahuzac s’enfonce et creuse encore, devenant malgré lui le révélateur d’une dérive des politiques fiscales qui ont petit à petit dépouillé l’État et mis en danger le bien commun, valeur essentielle à la cohésion et au progrès de la société. Le gouvernement sabre dans les dépenses publiques à loisir, mais n’est pas prêt de s’attaquer aux paradis fiscaux, il préfère donner un chèque en blanc aux fossoyeurs d’ArcelorMittal via le crédit impôt recherche. Le dernier live de la rédaction de Médiapart est indispensable à voir pour comprendre ces mécanismes et leurs implications (au passage, si vous savez pas quoi offrir pour Noël, un abonnement à Médiapart et Les Nouveaux Chiens de Garde en Vidéo en Poche seraient du meilleur effet…).

Pendant ce temps-là, dans le petit monde du cinéma, branle bas de combat à tous les postes de l’industrie. La TVA, passée au 1er Janvier 2012 de 5,5 à 7%, augmentera de nouveau au premier janvier 2014 pour passer à 10%. Hurlement général de tout un petit peuple d’exploitants, pire que s’ils étaient passés à la gégène du colonel Bigeard – récemment honoré par notre « gauche » au pouvoir – ou livré à la torture de l’inquisiteur Torquemada. Ainsi, au lieu de s’honorer en participant plus encore au redressement économique d’une patrie durement ébranlée par les turpitudes de la finance, on gémit, on ergote sur trois petits points de TVA en ajoutant des imprécations aux suppliques.

Et pourtant, avant d’en arriver à ce que la patrie en danger nous étouffe de ces trois points de TVA supplémentaires, les pistes étaient multiples dans lesquelles nos sans-culotte du cinéma auraient pu s’engouffrer au son de la Carmagnole, pour faire rendre gorge à la canaille néo-libérale. Brider la spéculation, réglementer les marchés, sanctionner les banquiers, taxer les profits au même niveau que le travail, faire rouler quelques têtes poudrées dans la sciure avant de les promener au bout d’une pique… voici quelques unes des mesures de santé publique que nous, exploitants de cinéma, aurions dû imposer au nouveau pouvoir. Bref ! Que du beau, que du bon, que du bonnet phrygien. Que des mesures que nous n’étions hélas pas nombreux, dans le monde du cinéma, à vouloir porter sur les fonds baptismaux d’une république bolivarienne.

Chacun le sait en effet, et certains nous le serinent parfois : le rôle d’un cinéma n’est pas de faire de la politique, ni même de plaider, c’est un comble, en faveur de la remise en service de l’aimable invention du professeur Guillotin. Le rôle d’un cinéma est de fermer son clapet et d’encaisser sans barguigner 3 points de TVA supplémentaires, tout comme il est sans doute dans le rôle d’un salarié responsable de célébrer les avantages d’un pacte de compétitivité dont on subodore, sans trop d’efforts d’imagination, où il va nous mener. Mais bon ! Trêve de politique puisque ce n’est pas notre affaire. Il faut cependant souligner à la décharge des pouvoirs publics que les salles de cinéma pénalisées demain par cette augmentation de TVA, à force de développement dans des temples hideux, où la banque à pop-corn tient lieu d’espace d’accueil, d’effets spéciaux à la gomme, de 3D, de blockbusters débiles et de bons résultats claironnés imprudemment, ont donné bien des verges pour se faire battre et sans doute est-il bien tard pour se draper dans la défense de l’exception culturelle française et se réclamer du livre et du spectacle vivant, quand on voit la drôle de tronche qu’affiche aujourd’hui dans son immense majorité l’exploitation cinématographique, de plus en plus essentiellement dominée par les multiplexes, ces super-marchés de l’image, gavés de pubs et de « produits annexes » et dont la contribution à l’exception culturelle tend à se réduire de plus en plus à faire payer à prix d’or aux distributeurs indépendants le passage de leurs bandes annonces.

« Par ailleurs le cinéma est une industrie » lança un jour Malraux dans un meeting gaulliste sur la culture. Quel ministre de gauche ou de droite pourrait aujourd’hui prendre le risque de faire sienne cette formule sans que l’on se foute de sa gueule ? Remarque subsidiaire : le taux actuel de la TVA sur le Pop-corn est de 5,5%… Il semblerait que le pop-corn, comme les boissons gazeuses, comme les confiseries, ne soit pas concerné par la prochaine augmentation de TVA… Produit culturel le pop-corn ? Produit de première nécessité ? Quoi d’autre ?