Rien ne se perd, tout se transforme… Les sous… et ce qu'ils deviennent

Le cinéma est un domaine un peu à part et s’iI y a des règles et jurisprudences quant aux éventuelles augmentations de loyer, il y a des critères généralement admis pour les conditions financières de cession des salles : recettes, nombre d’entrées, notoriété, état des lieux… Les vaillants repreneurs d’Utopia Toulouse n’ont donc pas bénéficié d’un traitement très exceptionnel, le contraire nous eut exposé aux foudres des services fiscaux, l’état réclamant sa part chaque fois qu’une transaction s’opère. Nous avons néanmoins choisi de nous en tenir à la version basse de l’évaluation, susceptible ne pas être contestée par les impôts, soit 1,2 millions d’euros, en justifiant ce chiffre par une série d’inconnues diverses et variées capables de constituer autant d’obstacles à la bonne marche du « Cosmo ». On vous en dresse un rappel succinct :
1/ un loyer dont il est difficile de savoir, dans l’état actuel de la procédure engagée, s’il sera majoré un peu, beaucoup, passionnément par le tribunal.
2/ une législation très contraignante concernant l’accueil des handicapés. Combien faudra-t-il investir, in fine, dans la mise aux normes d’un bâtiment conçu au xviiie siècle et comportant un élément protégé par les monuments historiques ?
3/ une incertitude quant à la pérennité de son exploitation elle-même, menacée par l’écrasante domination des multiplexes et les politiques erratiques des pouvoirs publics en matière de défense de « l’exception culturelle ».

Ne nous le cachons pas, avec autant d’inconnues sur la route de l’American Cosmograph, le défi est de taille et il lui faudra compter sur notre mobilisation à tous pour les surmonter.
Pour commencer nous avons trouvé une astuce pour alléger le montant de l’emprunt nécessaire à la transaction. Le prix de vente cité plus haut (1,2 millions d’euros) fera l’objet d’un abattement de 297 500 euros correspondant au montant des tickets d’abonnements illimités non consommés à ce jour. Une belle avance en trésorerie consentie à Utopia par vous-mêmes, chers spectateurs, et qui prendra la forme d’une sorte de crédit vendeur au Cosmograph sans intérêts et sur une durée longue… jusqu’à récupération complète des tickets d’abos qui sont dans la nature. Il va sans dire, mais il va encore mieux en le disant, que pour compenser les effets de ce crédit bis sur leur trésorerie, il conviendra que vous achetiez à nos jeunes amis du Cosmo un maximum de carnets d’abonnements qui, faut-il le rappeler une fois de plus, seront également valables de manière illimitée dans tous les Utopia.
Il restera donc 900 000 euros pour finaliser la succession. Le financement est trouvé, c’est le Crédit Coopératif, la banque partenaire d’Utopia depuis 25 ans, qui s’y colle avec la diligence et la bienveillance qu’on lui connaît et consent un prêt de 535 000 euros, complété par un Crédit Confirmé de 90 000 euros, tandis que l’IFCIC (Institut pour le Financement du Cinéma et des Industries Culturelles), très mobilisée sur un dossier considéré comme emblématique par la profession, a accepté de couvrir de sa caution solidaire l’ensemble du dossier, tout en allouant 300 000 euros de prêt supplémentaire.
Quand on sait que la nouvelle équipe a également prévu quelques investissements légers pour son installation dans le lieu, on aura compris que le décollage sera ric-rac.
Mais, me direz vous, que devient Utopia dans cette aventure ?

Rassurez-vous, Utopia continue de plus belle à Tournefeuille puisque la société qui le gère (Utopia Latin) est celle qui encaisse les ducats sonnants et trébuchants de la transaction, soustraction faite bien sûr de la part des impôts (autour de 270 000 euros). Ce qui nous reste va servir en partie à embellir notre petite utopie locale en faisant quelques transformations qui devraient vous plaire. Le solde abondera le Fond de Soutien commun à l’ensemble des Utopia et contribuera à créer quelque part en France une nouvelle salle, selon un modèle qui permet à Utopia de se développer depuis la fin du siècle dernier.
Nous faisons ainsi nôtre cette belle pensée du grec Anaxagore, exprimée environ 500 ans avant JC, bien avant que Lavoisier en tire la formule célèbre citée plus haut…

« Car rien ne nait ni ne périt dans les opérations de l’art, ni dans celles de la nature, mais des choses déjà existantes se combinent puis se séparent de nouveau »

Utopia arrive ainsi à un tournant de son histoire qui va nous conduire à explorer plusieurs pistes de réflexion, collectivement, en s’appuyant sur la « communauté d’intérêts » qui unit toutes nos salles et qui pourrait permettre aux générations à venir de continuer à construire sur les fondations que nous tentons actuellement de consolider. Permettre à d’autres salles de se créer, transmettre une conception de l’exploitation cinématographique qui milite pour l’évolution des esprits et une relation meilleure au monde qui nous héberge, créer un « fonds de dotation » à partir de la structure centrale qui existe déjà et auquel vous même pourriez cotiser… on vous racontera tout ça au fur et à mesure, histoire de laisser matière pour les prochaines gazettes d’Utopia que vous trouverez à l’American Cosmograph et dans vos dépôts habituels, et dont vous pouvez télécharger via notre site internet les PDF depuis le numéro de Septembre 2015 dans lequel s’amorçait l’évolution qui prends corps aujourd’hui.