DERNIER NOËL AVANT LA FIN D’UN MONDE
Le croiriez-vous ? La bonne nouvelle – car il y en a une – est arrivée le 9 novembre dernier du Conseil d’État, qui a annulé le décret de dissolution du mouvement des Soulèvements de la terre. Pris en Conseil des ministres fin juin, le décret suivait de peu la tentative de requalification – ou ...
La Paix, éternelle Utopie ?
Pas facile de décrypter le chaos du monde pour les spectateurs, plus ou moins lointains, que nous sommes, face aux faits tragiques qui nous submergent en avalanche via la presse, les réseaux sociaux, vraies ou fausses nouvelles… Et c’est dans ces moments-là que nous avons encore plus envie de croire...
LES SALLES UTOPIA SE METTENT AU VERT
Vous y croyez, vous, au bon sens qui voudrait que partir se bronzer les fesses à l’autre bout du monde avec des avions Macron volant avec du bio kérozène made in France serait bon pour votre corps et la planète ? Cela ne ressemblerait-il pas étrangement au discours tenu il y a quelqu...
Justine Triet parle d’or
Il aura donc suffi de quelques mots, à peine, pour que la Ministre de la Culture, celui de l’Industrie, quelques maires et députés de la majorité, volent dans les plumes et la palme de Justine Triet, réalisatrice couronnée d’Anatomie d’une chute, sermonnant en substance : « ce n’est pas bi...
Cédric KAHN - France 2019 1h41 - avec Catherine Deneuve, Emmanuelle Bercot, Cédric Kahn, Vincent Macaigne, Luana Bajrami, Alain Artur... Scénario de Cédric Kahn, Fanny Burdino et Samuel Doux.
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Dans le titre, le mot à retenir est « famille ». De fête ici, il n'y aura que la volonté initiale d'Andrea (Catherine Deneuve, résolument majestueuse) de célébrer son anniversaire dans la maison familiale en présence de ses enfants et petits-enfants. « Aujourd’hui c’est mon anniversaire et j’aimerais qu’on ne parle que de choses joyeuses. » Il y a dans cette injonction à la légèreté toutes les angoisses d'une mère qui pressent, tout en ne voulant surtout pas se l'avouer, que la journée ne va pas être des plus sereines. Mais qu'à cela ne tienne, une famille, ça rit, ça pleure, ça s'engueule, ça se balance quelques vacheries bien senties puis, autour du rôti, tout le monde boit finalement un coup pour se dire que ce n'est pas si grave et qu'on s'aime tous, malgré les choix ou les faux-pas de chacun.
Andrea a donc réuni ses deux fils. Le plus âgé, Vincent (Cédric Kahn lui-même), arrive avec sa femme médecin et ses deux enfants. Un couple a priori bien sous tous rapports, confortablement installé dans le moule petit bourgeois : sécurité de l'emploi et de l'affectif, cadre de vie rassurant. Le cadet, Romain (Vincent Macaigne), est d'un tout autre modèle : il est l'artiste de la famille, cinéaste plus ou moins raté, esprit fantasque au verbe grinçant et abondant, immature, imprévisible, colérique. Il débarque avec Rosita, sa toute neuve fiancée. Celle qui n'était pas prévue, c'est Claire, la fille aînée (Emmanuelle Bercot, impressionnante). Pas de couvert à table et pour cause : partie depuis trois ans à l'étranger, elle n'a quasiment jamais donné de nouvelles. Elle a pourtant laissé une fille, aujourd'hui adolescente, aux bons soins de sa mère…
Dans ce Cluedo familial où chacun joue son rôle, dans une unité de temps et de lieu bien définie comme dans une bonne tragédie grecque, Claire est l'électron libre, la grenade dégoupillée. Elle est la coupable et la victime, celle qui connaît les mobiles mais a tous les alibis, elle est celle qui subit l'histoire mais tente d'en inverser le cours et de reprendre la main sinon sur sa vie, du moins sur la place qu'elle occupe dans sa famille. On le comprend assez vite, Claire avance comme suspendue au bord d'un gouffre qu'elle aurait elle-même creusé : entre cris et larmes, entre rires et drames, elle retrouve les siens dans une humeur instable et survoltée que chacun, déjà, appréhende tant elle a ce don d'attirer vers elle toutes les attentions, tous les égards, tous les agacements. Et si Claire est revenue, c'est peut-être pour l'anniversaire de sa mère, mais sans doute pas uniquement. Comme dans toute famille qui se respecte, il y a dans celle-ci quelques loups cachés, quelques dossiers délicats que personne n'a le cœur ni l'envie de ressortir. Mais c'est bien connu, le linge sale…
« Ça va partir en sucette, exactement comme d'habitude ! ». C'est Vincent qui le dit et c'est ce que le film va mettre en scène. Entre comédie et cauchemar domestique, Fête de Famille avance avec une précision et une intelligence – dans la construction du récit, dans la caractérisation des personnages et leur évolution – qui nous rappellent que Cédric Kahn est un réalisateur exigeant et remarquablement talentueux. Là où d'autres auraient pu se contenter d'un franc jeu de massacre ou d'une chronique familiale déjantée, il ose une tonalité pas toujours aimable et pas forcément évidente à cerner mais qui incarne avec beaucoup de justesse les pulsions, les paradoxes et les (dés)équilibres qui unissent et désunissent les membres indissociables de ce corps complexe.