DERNIER NOËL AVANT LA FIN D’UN MONDE
Le croiriez-vous ? La bonne nouvelle – car il y en a une – est arrivée le 9 novembre dernier du Conseil d’État, qui a annulé le décret de dissolution du mouvement des Soulèvements de la terre. Pris en Conseil des ministres fin juin, le décret suivait de peu la tentative de requalification – ou ...
La Paix, éternelle Utopie ?
Pas facile de décrypter le chaos du monde pour les spectateurs, plus ou moins lointains, que nous sommes, face aux faits tragiques qui nous submergent en avalanche via la presse, les réseaux sociaux, vraies ou fausses nouvelles… Et c’est dans ces moments-là que nous avons encore plus envie de croire...
LES SALLES UTOPIA SE METTENT AU VERT
Vous y croyez, vous, au bon sens qui voudrait que partir se bronzer les fesses à l’autre bout du monde avec des avions Macron volant avec du bio kérozène made in France serait bon pour votre corps et la planète ? Cela ne ressemblerait-il pas étrangement au discours tenu il y a quelqu...
Justine Triet parle d’or
Il aura donc suffi de quelques mots, à peine, pour que la Ministre de la Culture, celui de l’Industrie, quelques maires et députés de la majorité, volent dans les plumes et la palme de Justine Triet, réalisatrice couronnée d’Anatomie d’une chute, sermonnant en substance : « ce n’est pas bi...
Également au programme - LA ROSIÈRE DE PESSAC - LE COCHON - LES DERNIERS COURTS MÉTRAGES - LES MAUVAISES FRÉQUENTATIONS - MES PETITES AMOUREUSES - NUMÉRO ZÉRO - UNE SALE HISTOIRE
Écrit et réalisé par Jean EUSTACHE - France 1973 3h40 - avec Bernadette Lafont, Françoise Lebrun, Jean-Pierre Léaud, Isabelle Weintgarten, Jacques Renard, Jean-Noël Picq, Jean Douchet, Jean Eustache... Festival de Cannes 1973 : Grand Prix spécial du jury et Prix de la Critique internationale. Directeur de la photographie : Pierre Lhomme - VERSION RESTAURÉE.
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Depuis près d’un demi-siècle, La Maman et la putain hante le cinéma, faisant figure de totem pour les cinéphiles et les cinéastes – français mais pas seulement. Le culte qu’il génère auprès de celles et ceux qui font le cinéma aujourd’hui est international, la liste de ses fans, génération après génération, donne le tournis : elle va de Wim Wenders à Michael Haneke, de Jane Campion à Claire Denis, de Jim Jarmusch à Jacques Audiard, de John Waters à Gaspar Noé, à Noah Baumbach, à Cédric Klapisch, à Guillermo Del Toro…
49 ans après le scandale suscité lors de sa présentation à Cannes en mai 1973 (ce fut une sacrée édition, quand on sait que c’était également l’année de La Grande bouffe !), 40 ans après la disparition de son réalisateur (Jean Eustache s’est suicidé en novembre 1981), La Maman et la putain n’en finit pas de nous « parler ». Il était pourtant devenu rare depuis sa sortie – voire même quasiment invisible, en tout cas dans de bonnes conditions – jamais encore restauré. Il n’en a pas moins continué de symboliser quelque chose comme un absolu du cinéma d’auteur, du cinéma de chambre, du cinéma de la rencontre. Quel que soit l’endroit par lequel on le prenne, il subjugue : sa durée est hors-norme, son noir et blanc a quelque chose d’originel et de fantomatique. Le jeu des comédiens (centré pour l’essentiel autour du trio Lafont, Léau, Lebrun) est anticonformiste dans sa façon de refuser le naturalisme sans pour autant se refuser au sentiment. Sa mise en scène épurée, tout entière dans la retenue, retrouve l’assurance magnétique des classiques, ces « fondamentaux » qu’Eustache admirait plus que tout : Renoir, Lubitsch, Guitry, Pagnol, Mizoguchi, Lang, Dreyer,
Murnau… Dans une totale économie de moyens, la mise en scène de Jean Eustache, par un découpage rigoureux, se mettait toute entière à la disposition d’un « texte de feu », selon les mots de Bernadette Lafont.
Ses interrogations sur le couple, sur la liberté d’aimer sans entrave et sur l’inassumable possession amoureuse, ses mots pris dans la fièvre du discours amoureux, son lyrisme, passant du sublime au ridicule en repassant par le sublime, ont décrit, comme aucun film, l’intime tel qu’il se dit et s’écrit entre des amants tout au long d’une nuit, ou deux, ou cent. En cela, 50 années ne l’ont pas fait vieillir : tout au contraire, La Maman et la putain est le film de ceux qui se posent la question d’avoir à réinventer l’amour.
Eustache tourne La Maman et la putain à Paris, entre Montparnasse et Saint-Germain des Prés, en sept semaines, de début juin à fin juillet 1972, exigeant de ses acteurs qu’ils respectent son texte à la lettre. Il ne pouvait en être autrement pour lui : avant d’en revenir à ses souvenirs d’enfance (Mes petites amoureuses, qui devait être son premier long métrage mais qu’il tourna un an plus tard), il lui fallait écrire, faire jouer, donc entendre et voir, le désordre actuel de sa vie amoureuse pour commencer à la comprendre. La première puissance du film, c’est son caractère écorché, à vif, une histoire éperdue d’amour que seul le cinéma pouvait, éventuellement, consoler.
(Sonia Buchman)