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US

Écrit et réalisé par Jordan Peele - USA 2018 1h56mn VOSTF - Avec Lupita Nyong’o, Winston Duke, Elisabeth Moss, Tim Heidecker, Shahadi Wright Soeph, Evan Alex...

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

USUs = nous = United ­States. Cette équivalence se vérifie lorsque Red (Lupita Nyong’o) énonce d’une voix de pendue (étranglée, spectrale) à l’adresse d’Adelaide Watson (Lupita Nyong’o aussi) : « We are Americans. » Le deuxième long-métrage de Jordan Peele, après Get out (2017), n’a pas commencé depuis bien longtemps, il a déjà traversé l’horreur populaire, la satire sociale et l’angoisse quotidienne pour atterrir à pieds joints dans l’un des sous-genres les plus populaires du cinéma d’horreur contemporain : le home invasion movie, la mise en scène d’une des peurs les mieux ancrées depuis la généralisation des serrures sur les portes, l’irruption d’étrangers mal intentionnés dans le domicile familial.
Les tribulations de la famille d’Adelaide Watson – et de ceux et celles qui ont payé pour les voir sur grand écran – ne s’arrêteront pas là. Annoncé comme un pur film d’horreur, par opposition à Get Out, à la fois commentaire social et film de genre, Us ne se tient jamais tout à fait à ce programme, quelle que soit la virtuosité joyeusement destructrice dont témoigne Jordan Peele lorsqu’il lui faut renouveler les figures imposées de la discipline. Le récit éclate sans cesse en images indélébiles qui renvoient non seulement à l’histoire passée et présente des États-Unis, mais aussi à celle du cinéma et plus généralement de la culture populaire.
Le réalisateur flirte avec la surdose – d’informations, d’idées – et Us tourne le dos à la rigueur qui comptait pour une bonne part dans la force d’impact de Get Out. Bombardés d’idées brillantes énoncées en un plan, de visions qu’on veut associer entre elles pour leur donner tout leur sens, spectateurs et spectatrices se trouvent parfois dans la situation d’un joueur qui se rend compte que la boîte de son puzzle contient aussi des pièces d’une autre image. Ce n’est pas de tout repos, c’est le prix à payer pour entrer dans un film aussi effrayant qu’excitant intellectuellement.

Avant qu’Adelaide ne devienne l’épouse de Gabe (Winston Duke), la mère de Zora (Shahadi Wright ­Joseph) et de Jason (Evan Alex), elle fut – le temps d’un prologue – la petite Addy que son père laissa négligemment partir à l’aventure sur la plage de Santa Cruz, jusqu’à une fête foraine inquiétante, ­espèce de bouche de l’enfer où devait se sceller le destin de l’enfant. C’était en 1986, au moment où les Etats-Unis s’offraient un moment de bonne conscience, en formant une chaîne humaine baptisée Hands Across America, destinée à vaincre la pauvreté et le mal-logement (comme la plupart des détails et des références égrenés au fil du récit, celui-ci prendra tout son sens au moment où on l’aura presque oublié).Un petit quart de siècle plus tard, Adelaide a gardé de cet épisode un souvenir flou et une détestation pour la plage, alors que son bon gros géant de mari ne rêve que d’y emmener les enfants. Au bord de l’eau, ces petits-bourgeois cultivés mais pas ­coincés (leur aînée porte le prénom d’une grande poétesse afro-américaine, leur cadet celui du tueur de Vendredi 13) retrouvent une première version de leurs doubles : la famille Tyler, maman (Elisabeth Moss), papa (Tim ­Heidecker) et leurs jumelles. Incarnation du consumérisme le plus effréné, les Tyler entretiennent avec les Watson une relation qui – Jordan Peele sait comment le faire savoir en une demi-réplique et un échange de regards entre matriarches – trimbale toutes les ambiguïtés et les non-dits de l’Amérique « postraciale ».Mais sur la plage, à l’endroit exact où sa mère s’est perdue, le jeune Jason a entrevu la catastrophe à venir. C’est une famille, identique au clan Watson, aux traits déformés par on ne sait quelle rancœur. La nuit venue, le quatuor de doubles, vêtu de combinaisons rouges qui évoquent les tenues carcérales américaines, se présente à la porte de la maison de vacances d’Adelaide et des siens pour y asseoir un règne de terreur.

Il y aura du sang, des courses dans la nuit, des visages terrifiants qui surgiront de l’obscurité, l’apprentissage de la violence par des gens qui ne l’avaient jamais pratiquée, toutes les stations du calvaire ordinaire des personnages de l’horreur, dessinées avec vigueur et conviction. des divisions sociales et communautaires dans la société américaine. Sous les pas des Watson, Jordan Peele a ouvert trop d’abîmes. Il ne reste qu’à profiter du vertige, avec la certitude que l’ex-imitateur du président Obama est devenu l’une des attractions majeures du grand carnaval du cinéma américain.

D’après Thomas Sotinel (Le Monde)