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VORTEX

Écrit et réalisé par Gaspar NOÉ - France 2022 2h22mn - avec Françoise Lebrun, Dario Argento, Alex Lutz, Kylian Dheret...

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

VORTEXUne minuscule terrasse sur les toits de Paris, quelques rosiers et un coin de ciel bleu. Un vieux couple autour d’un verre de vin blanc : « À nous » dit-elle. Dans cette séquence inaugurale, les protagonistes partagent encore une seule image ; pour peu de temps, car ils s’apprêtent à être séparés, par la maladie (elle a l’esprit qui chavire, il a le cœur qui flanche) comme par le cinéma, par le biais d’un écran divisé en deux images – deux parcours spatio-temporels définitivement dissociés tout en étant inextricablement liés par des décennies de vie commune, un appartement surchargé de souvenirs et la présence d’un fils qui tente tant bien que mal de jouer son rôle d’aidant…

On avait coutume de vivre avec Gaspar Noé des expériences psychédéliques qui virent au cauchemar. Le réalisateur touche ici à la simplicité brutale d’un cinéma intime et universel, celui des corps qui se fanent sur des airs de Françoise Hardy, des laissés-pour-compte, de l’existence humaine dans toute sa fragilité. Le voilà questionnant de nouveau la fin de vie avant le vide : comme dans Enter the void, treize ans plus tôt, où il rêvait déjà de réincarnation. Dans Irréversible, il retournait le temps et cherchait désespérément à réparer ce qui avait été si sauvagement brisé. « Le temps détruit tout » nous disait-il. Avec Vortex, il saisit avec une finesse désarmante ce qui fait de la vie une expérience si brève et pourtant essentielle, ce qui l’oppose au néant et la rend si précieuse. L’ouverture l’annonce d’emblée, c’est un film dédié « à tous ceux dont le cerveau se décomposera avant le cœur ». À ceux renvoyés avant l’heure dans « le silence éternel de ces espaces infinis » tant redouté par Pascal. Qui n’ont plus leur mémoire comme garde-fou. À l’heure où près d’un million de Français sont aujourd’hui touchés par la maladie d’Alzheimer, autant dire qu’il peut être autant douloureux que cathartique de partager cette réalité dans l’obscurité d’une salle de cinéma, qui fait elle aussi office d’espace infini quand elle consacre aussi bien la complexité humaine.

Il y a une grande tendresse dans la façon qu’a Gaspar Noé de filmer les corps imparfaits de ses personnages, dans leur quotidien parfois pataud et disgracieux, quand les muscles et les organes sont fatigués. Corps des aïeux, que nous avons fini par redouter en Occident, au point de les refourguer aux soins palliatifs et aux Ehpad pour ne plus avoir à se confronter à leur faillibilité. Pourtant, ces corps symbolisent une grande richesse : celle d’avoir vécu vieux. Voire même, d’avoir bien vécu, comme l’illustre la foultitude de livres, de souvenirs, de photos qui meublent l’appartement du duo Françoise Lebrun / Dario Argento. Ce bric-à-brac sans valeur ainsi pris isolément est l’ultime rempart du couple contre le néant, comme s’ils appartenaient à l’une de ces anciennes civilisations qui remplissaient leurs tombeaux d’objets pratiques et précieux pour les accompagner dans l’au-delà. Après tout, que nous reste-t-il à la fin, si ce n’est la mémoire ? En dépit d’un corps en déclin et d’une compagne dont l’esprit s’étiole, Dario Argento s’obstine à faire sa grande œuvre, soit écrire un livre sur les rêves (« parce que la vie est un rêve dans un rêve ») et le cinéma, à l’aide d’une machine à écrire désuète et de notes à la main. La résistance est là, celle de la vitalité presque obtuse, celle de l’impossibilité de se résoudre à sa propre finitude, à tourner la page. La vie semble ainsi éternelle chez Gaspar Noé, elle est à la fois un tout et un rien, un vortex où l’on est tour à tour enfant, puis adulte, puis de nouveau enfant. Comme une ronde, le temps se termine pour finalement recommencer.

(C. L., magazine V.O.)