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FRÈRE ET SOEUR

Écrit et réalisé par Arnaud DESPLECHIN - France 2022 1h47mn - avec Marion Cotillard, Melvil Poupaud, Golshifteh Farahani, Patrick Timsit, Benjamin Siksou, Saverio Maligno, Max Baissette de Malglaive... Sélection officielle, en compétition, Festival de Cannes 2022.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

FRÈRE ET SOEURLe nouveau et quatorzième long-métrage d’Arnaud Desplechin creuse la veine familiale qui revient dans son œuvre en pointillé, entamée très tôt avec La Vie des morts (1991) et continuée avec Un conte de Noël (2008). Veine qui est celle du récit choral, du retour à la maison (Roubaix, ville natale du cinéaste et son Ithaque de fiction), du brassage des liens filiaux, des rituels, des devoirs et du ressentiment qui gît en dessous.
La famille étant également le lieu des grandes passions, c’est ainsi d’un sentiment démesuré que le film retrace la généalogie particulière : la haine franche et sans mélange qui oppose depuis des années un frère et une sœur, Louis (Melvil Poupaud) et Alice (Marion Cotillard). Lui est écrivain, profondément brisé par la perte d’un enfant, elle comédienne, jouant tous les soirs Les Morts, de James Joyce, sur les planches.
La haine a une histoire, généralement embrouillée car ses causes se perdent dans l’enchaînement de ses péripéties. L’événement qui permet ici d’en reconvoquer les différentes strates est un accident de la route (la scène, superbe et terrible, est une merveille de suspense millimétré), subi par les parents des protagonistes, qui se retrouvent à l’hôpital et à l’article de la mort. Louis et Alice ne peuvent se presser à leur chevet que sous la condition expresse, exigée par l’actrice, de ne surtout pas se retrouver en présence de son frère. Une demande qui aura pour effet rocambolesque de « partitionner » les retrouvailles familiales de part et d’autre d’un Rubicon invisible. Que chacun retrouve les siens, mais seulement dans son coin.

De quoi est fait un lien de parenté ? De quel mystère, de quelle violence ?
Chacun à sa façon, Alice et Louis s’inventent une existence autre que fraternelle. Elle, sur les planches, bien entendu, où les alertes du deuil n’entament rien de sa stature de comédienne… Lui dans la réclusion, vivant en ermite à l’autre bout de la France, dans une campagne toulousaine inaccessible, sauf à dos de cheval.
Entre eux, la ligne de front est celle que dessine le montage, oscillant majestueusement entre présent et passé, comme une mémoire active, mais aussi entre ces dimensions croisées que sont la vie, la scène, le rêve (Louis flottant sur les toits de Roubaix lors d’un délire psychotrope). Rarement la caméra de Desplechin, d’une formidable mobilité, n’aura œuvré avec autant d’adresse pour prendre la mesure d’une distance.

Opposant deux figures d’artistes aux égos turbulents, Frère et sœur pose une question qui concerne de près le sacerdoce artistique, celle du partage impossible entre vie privée et vie publique, et plus encore entre l’œuvre et le vécu. Car si Alice en veut mortellement à Louis, c’est pour avoir divulgué sans vergogne quelque chose de leur relation dans ses livres – et l’on pourrait gloser sur les liaisons dangereuses qu’entretient le récit avec le cas réel de Desplechin, lui-même mêlé à de tels litiges à cause de ses films.
Si la haine engage un destin, elle n’en constitue pas moins une relation dans le temps. La détestation que se vouent Louis et Alice a beau les éloigner, elle est aussi ce qui les « noue » l’un à l’autre, ce qui les maintient, même à distance, ce qui les anime, même dans l’autodestruction. La haine, comme on le sait, est une forme extrême d’affection à laquelle il arrive, comme ici, d’atteindre un stade obsessionnel, voire fusionnel. C’est cet étrange miroir que Frère et sœur tend à ses personnages, sans excès de misanthropie, mais sur une tonalité aiguë et caressante. La haine persiste, mais elle n’est peut-être qu’un jeu, une chamaillerie, car frère et sœur demeurent toute leur vie, l’un envers l’autre, surtout des enfants.

(M. Macheret, Le Monde)