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Install-party samedi 18 juin à Tournefeuille
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SANS FILTRE

(TRIANGLE OF SADNESS) Écrit et réalisé par Ruben ÖSTLUND - Suède 2022 2h29mn VOSTF - avec Charlbi Dean, Harris Dickinson, Woody Harrelson, Vicki Berlin, Dolly De Leon... PALME D’OR, FESTIVAL DE CANNES 2022.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

SANS FILTRELes ultra-riches et les autres sont dans un bateau. Le bateau coule, qu’est-ce qui reste ?… Le point de départ de Triangle of sadness a la simplicité d’une innocente devinette et – tout comme la simplicité de l’installation artistique de The Square (1re Palme d’Or en 2017) – constitue un centre à l’efficacité redoutable pour décrire le chaos de la complexité des relations économiques et humaines qui gravitent autour. Il vous faut savoir que nous sommes en présence d’une comédie brillante et féroce qui ne se contentera pas de vous faire rire confortablement assis sur le velours de nos fauteuils : elle percute l’actualité brûlante de notre époque – aussi ce texte va-t-il s’efforcer d’en dire le moins possible pour ne pas diminuer son impact. Hasard, jeu, ou calcul savant, les deux titres de ces films, le carré et le triangle, renvoient aux figures mères de la géométrie, archétypes purs, primitifs, qui servent de modèle à toutes les formes visibles, que l’on retrouve dans d’autres systèmes de pensée s’efforçant de décrire le monde. Au vu du tableau apocalyptique de ce dernier opus, la prochaine Palme d’Or du cinéaste suédois pourrait s’intituler « Le Cercle de l’Enfer », tant chacun de ses films, depuis Snow therapy, franchit une nouvelle étape dans la férocité de la description de nos rapports sociaux.
Mais, contrairement à ce qu’on a pu entendre ou lire, Ruben Östlund est tout sauf cynique. Les repas de famille entre sa mère communiste et son frère conservateur réactionnaire ont dressé une nappe haute en couleur comme toile de fond de sa vision du monde, et sa conviction dans la capacité de l’art et des idées à influer sur le cours des choses est profondément enracinée. Réminiscence de ces repas, le dialogue au centre du film entre l’oligarque russe néolibéral qui vend, selon ses propres mots, de la merde, et le capitaine de bateau idéaliste, alcoolique et marxiste, est un pivot d’une drôlerie irrésistible qui à lui seul vaut le déplacement.

Comme le martèle sa compatriote Greta Thunberg depuis quelques années, il y a de quoi faire (sont-ce les origines vikings des Suédois qui en font de tels combattants tenaces ?) et, comme le disait Chico Mendes, « l’environnementalisme sans lutte des classes, c’est du jardinage. » Aussi Ruben Östlund attaque-t-il plutôt ce versant de l’iceberg vers lequel on fonce tout droit. Le choix du décor principal, un yacht de croisière de luxe, est à ce titre emblématique et fait écho à l’été que l’on vient de vivre. Réalité rattrapant la fiction, au cœur de la canicule, des articles relataient à Toulouse comment des activistes sabotaient des terrains de golf pour protester contre l’arrosage abusif au profit des riches, Elon Musk et consorts se plaignaient que l’on traque les trajets de leurs jets privés et, depuis quelques jours, les militants s’attaquent sur le même mode à la consommation des yachts de grandes fortunes. Ainsi le capitaine de bateau ivre interpelle-t-il les passagers sur les conséquences du capitalisme dérégulé, « qui produit le yacht, la tempête, les vomissements et la merde ». Ruben Östlund dit qu’il n’avait aucune peur d’en faire trop, et qu’il valait mieux pousser au-delà des limites parce qu’alors ça devient autre chose, un « enfer amusant ». On pourrait convoquer aussi bien Jean Renoir, Blake Edwards, Luis Bunuel et Peter Brook que Ferreri et La Grande bouffe pour tenter de décrire Sans filtre.
Mais le film n’aurait qu’un intérêt relatif s’il n’était qu’une charge contre la responsabilité des riches. Comme un éclat de rire féroce au cœur de la tempête, le renversement de situation qui suit le naufrage nous renvoie à notre propre complicité et le plan final nous hantera longtemps. Pour paraphraser Thomas Elliot et son poème Les Hommes creux, c’est ainsi que finit le monde : pas dans un murmure, mais dans le fracas d’une explosion. Accrochez-vous au bastingage, et merci de ne pas vomir sur la moquette…