DERNIER NOËL AVANT LA FIN D’UN MONDE
Le croiriez-vous ? La bonne nouvelle – car il y en a une – est arrivée le 9 novembre dernier du Conseil d’État, qui a annulé le décret de dissolution du mouvement des Soulèvements de la terre. Pris en Conseil des ministres fin juin, le décret suivait de peu la tentative de requalification – ou ...
La Paix, éternelle Utopie ?
Pas facile de décrypter le chaos du monde pour les spectateurs, plus ou moins lointains, que nous sommes, face aux faits tragiques qui nous submergent en avalanche via la presse, les réseaux sociaux, vraies ou fausses nouvelles… Et c’est dans ces moments-là que nous avons encore plus envie de croire...
LES SALLES UTOPIA SE METTENT AU VERT
Vous y croyez, vous, au bon sens qui voudrait que partir se bronzer les fesses à l’autre bout du monde avec des avions Macron volant avec du bio kérozène made in France serait bon pour votre corps et la planète ? Cela ne ressemblerait-il pas étrangement au discours tenu il y a quelqu...
Justine Triet parle d’or
Il aura donc suffi de quelques mots, à peine, pour que la Ministre de la Culture, celui de l’Industrie, quelques maires et députés de la majorité, volent dans les plumes et la palme de Justine Triet, réalisatrice couronnée d’Anatomie d’une chute, sermonnant en substance : « ce n’est pas bi...
Jeremiah ZAGAR - USA 2018 1h34 VOSTF - avec Raul Castillo, Sheila Vand, Evan Rosado, Isaiah Kristian... Scénario de Jeremiah Zagar et Daniel Kitrosser, d'après le roman de Justin Torres, Vie animale.
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L’histoire se déroule dans un monde de jeunes garçons, mais les filles pourront s'y reconnaître, le propos a une force, une subtilité qui touche à l'universel, à l'organique. Jonah, Manny, Joel ont presque la même taille, trois frères unis dans la vie comme les mousquetaires, pour les meilleures blagues comme pour les pires bêtises. Gueules d’anges destinés à être déchus. C’est simple, on dirait des triplés. Cheveux ras, teints métissés, paires d’yeux qui pétillent. C’est par ceux de Jonah qu’on pénètre dans leur histoire, par la porte dérobée de son jardin secret, qu’il protège jalousement, même de ses propres frangins. Le soir venu, quand plus rien ne bouge dans la modeste maisonnée, il ouvre en cachette une sorte de journal intime, qui l’aide à extérioriser ses sentiments, à les dominer, à expulser la violence accumulée. C’est comme une BD quotidienne, pleine de poésie, de fougue et de rage contenues.
Certes, nul doute ici que tous s’aiment… à leur manière. Mais tous subissent la relation orageuse de Paps (leur père) et Ma (leur mère). Le quotidien de ces deux-là a décidément tout d’une montagne russe et on sent que ce n’est pas nouveau. Toujours les mêmes scènes qui ont un goût de réchauffé. Prompts à se déchirer, à hurler, à cogner dans les portes… Plus prompts encore à se rabibocher, tels deux naufragés de la vie qui n’auraient pas d’autre bouée de sauvetage. Ils sont tout l’un pour l’autre, autant qu’ils ne sont rien. Étaient-ils simplement préparés à devenir parents ? À les voir, on n’y croit pas un seul instant. Rien de stabilisant, rien de sécurisant. Tant et si bien que leurs gamins se sont forgés à l’art de la débrouille et pas uniquement dans la cuisine. Et puis, surtout, ils ont appris à s’évader loin dans leurs rêves, à se tenir chaud mutuellement. Quand ça barde, ils se confectionnent un nid de fortune, blottis comme d’infortunés oiseaux, entonnant une litanie protectrice connue d’eux seuls : « Nous famille, corps chaud, corps chaud, corps chaud ». Un véritable rituel intime, créé sur mesure, comme pour se rassurer le temps que la tempête s’éloigne une fois de plus. Un rituel avant que la suivante ne revienne. Encore tout petits, mais déjà fatalistes.
Si Jonah a neuf ans, les deux autres ne sont pas loin devant ou derrière. Dans les premières phrases de son récit fort simple, fort beau, on perçoit aussi comme une espèce de nostalgie : « Quand nous étions frères nous voulions plus, plus de bruit, plus de muscles »… Comme si leur tribu était amenée à se dissoudre. Ou tout simplement l’âge adulte à les attraper et puis les séparer… Mais peut-être est-ce tout autre chose. Progressivement, l’univers riche et onirique de Jonah semble prendre plus de place ainsi que son nouveau copain Dustin, un blondinet toujours rivé à ses écrans. Il est le plus grand, celui qu’on bade, qui sait des choses qu’on n’aurait pas imaginé… Pour Manny et Joël, cela sonne comme une trahison. Tandis que Paps, las de s'entre-déchirer avec Ma, vient de mettre les voiles, une fois de plus… Mais il revient toujours.
C’est un très beau regard sur l’enfance malmenée, qui construit une forme de résilience, de rempart imaginaire pour se protéger. La manière de tourner est modeste, comme le milieu décrit. La caméra observe le monde à niveau d’enfant, adoptant des angles qui nous montrent les choses comme par leur regard. La grande force du film repose sur les épaules des enfants acteurs, formidables, en particulier Evan Rosado qui interprète Jonah… Juste et poignant, le scénario est parcouru par ce souffle vivifiant et léger propre à l’enfance qui lui donne un charme bouleversant.