LA GAZETTE
(à télécharger au format PDF)

NOUS TROUVER
(et où trouver la gazette)

NOS TARIFS :
TARIF NORMAL : 7,50€
CARNET D'ABONNEMENT : 55€ (10 places, non nominatives, non limités dans le temps, et valables dans tous les Utopia)
Séance avant 13h : 5€
Moins de 18 ans : 5€

RSS Cinéma
RSS Scolaires
RSS Blog

(Quid des flux RSS ?)

EN DIRECT D'U-BLOG

Le blog des profondeurs...
(de champ)

La Paix, éternelle Utopie ?
Pas facile de décrypter le chaos du monde pour les spectateurs, plus ou moins lointains, que nous sommes, face aux faits tragiques qui nous submergent en avalanche via la presse, les réseaux sociaux, vraies ou fausses nouvelles… Et c’est dans ces moments-là que nous avons encore plus envie de croire...

LES SALLES UTOPIA SE METTENT AU VERT
Vous y croyez, vous, au bon sens qui voudrait que partir se bronzer les fesses à l’autre bout du monde  avec des avions Macron volant avec du bio kérozène made in France serait bon pour votre corps et la planète ? Cela ne ressemblerait-il pas étrangement au discours tenu il y a quelqu...

Justine Triet parle d’or
Il aura donc suffi de quelques mots, à peine, pour que la Ministre de la Culture, celui de l’Industrie, quelques maires et députés de la majorité, volent dans les plumes et la palme de Justine Triet, réalisatrice couronnée d’Anatomie d’une chute, sermonnant en substance : « ce n’est pas bi...

Rosmerta continue ! Vous connaissez l’histoire ? 
Depuis les débuts, et même avant, Utopia Avignon suit l’histoire de près ! Ça fait presque cinq ans qu’on vous en parle dans nos gazettes, à chaque rebondissement. Ce qu’il s’est passé depuis 2018 : réquisition citoyenne d’une école vétuste appartenant au diocèse, procès et appel...

Soutenez Utopia Palmer

LE DAIM

Écrit, filmé, monté et réalisé par Quentin DUPIEUX - France 2019 1h17 - avec Jean Dujardin, Adèle Haenel, Albert Delpy, Pierre Gommé, Marie Bunel...

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

LE DAIMOn sait – ou on ne sait pas – qui est Quentin Dupieux. Soit un artiste à double visage, musical et cinématographique, mais à visée unique, venu de la lointaine galaxie dada. Distorsion parodique de l’art officiel, fantaisie bricoleuse, éloge du dérisoire, de l’aléatoire, de la monomanie. L’aventure, d’intensité variable, comprend au cinéma huit longs-métrages réalisés depuis 2001, entre France et Californie, soutenue le cas échéant par quelques grands noms de la comédie (Éric Judor, Alain Chabat, Benoît Poelvoorde…).



C’est aujourd’hui Jean Dujardin que l’on retrouve au centre de la sombre, étrange et méchamment drôle affaire figurée par Le Daim. Un long et mystérieux parcours en voiture sur nos belles routes de France le révèle à notre attention. La bagnole a un passé, le personnage aussi. Chemise fripée, pantalon fatigué, œil terne, air hagard. L’air d’un gars qui vient de tout plaquer, pas nécessairement pour aller vers le mieux. Que fuit-il ? Où va-t-il ? Que veut-il ? Patience…
Le premier indice est livré dans les toilettes d’un restoroute, dans la cuvette desquelles le gars s’évertue à noyer sa veste en velours bronze. Repartant ipso facto en chemise, il fait ensuite halte, sur fond de paysage montagneux, dans une maison où l’attend un vieux bonhomme avec lequel il a visiblement rendez-vous. Le type sort d’un placard, avec un luxe rare de précautions, un vieux blouson en daim couleur cognac, avec franges à hauteur de la poitrine, d’un modèle dont on n’envisage pas qu’il ait pu être un jour fabriqué.
Le deuxième indice, qui nous met définitivement sur la voie, c’est que Georges/Dujardin l’enfile aussi sec, se regarde dans la glace et se met à rayonner de l’intérieur, alors même que le vêtement, importable par quiconque, l’engonce tout particulièrement. Georges éprouve alors ce que Blaise Pascal vécut durant sa « nuit de feu » du 23 novembre 1654 : une révélation mystique. Désormais converti à son blouson suédé, Georges non seulement décide qu’il n’en sera plus jamais séparé, mais tend à penser que le seul vrai blouson est le blouson qu’il porte et que partant de là les autres ne sont que de vils imposteurs.
À cela s’ajoute que la somme démentielle qu’il a dépensée pour payer la pelure mythique a rincé son compte en banque, que l’hôtel pyrénéen old style dans lequel il a élu domicile n’entend pas lui faire crédit pour autant, et que de fil en aiguille il lui faut fissa se réinventer une vie en même temps qu’un moyen de la gagner. Georges improvise. Se déclare cinéaste sans rien y connaître, sur la foi du caméscope que le vieux lui a concédé en bonus. Puis séduit par Denise, la serveuse doucement frappée du bar de la ville (Adèle Haenel), laquelle a justement de son côté la passion des films et du montage.

L’affaire est aussitôt enlevée et permet à Georges, qui délire sur une histoire de gros producteurs coincés à l’autre bout du monde, de soulager Denise de ses économies et de l’embaucher comme monteuse de son film, en l’espèce des rushes informes qu’il enregistre avec son caméscope. Plus confidentiellement, Georges entame avec son blouson un dialogue intime et quotidien en même temps que le daim envahit, petit à petit, toute sa garde-robe. Sous sa vocation usurpée de cinéaste, un vrai projet existentiel se précise en revanche : être le seul homme sur terre à porter un blouson, au besoin en délestant plus ou moins violemment ses semblables du leur… On conçoit bien ce que ce projet obsessionnel peut avoir d’inquiétant…
Arrêtons-là le déroulé narratif de cette fantaisie horrifique… pour dire à quel point Jean Dujardin et Adèle Haenel, en illuminés qui se sont trouvés, sont bons dans ce film… à ce jour le plus réussi de Quentin Dupieux.

(J. Mandelbaum, Le Monde)