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La Paix, éternelle Utopie ?
Pas facile de décrypter le chaos du monde pour les spectateurs, plus ou moins lointains, que nous sommes, face aux faits tragiques qui nous submergent en avalanche via la presse, les réseaux sociaux, vraies ou fausses nouvelles… Et c’est dans ces moments-là que nous avons encore plus envie de croire...

LES SALLES UTOPIA SE METTENT AU VERT
Vous y croyez, vous, au bon sens qui voudrait que partir se bronzer les fesses à l’autre bout du monde  avec des avions Macron volant avec du bio kérozène made in France serait bon pour votre corps et la planète ? Cela ne ressemblerait-il pas étrangement au discours tenu il y a quelqu...

Justine Triet parle d’or
Il aura donc suffi de quelques mots, à peine, pour que la Ministre de la Culture, celui de l’Industrie, quelques maires et députés de la majorité, volent dans les plumes et la palme de Justine Triet, réalisatrice couronnée d’Anatomie d’une chute, sermonnant en substance : « ce n’est pas bi...

Rosmerta continue ! Vous connaissez l’histoire ? 
Depuis les débuts, et même avant, Utopia Avignon suit l’histoire de près ! Ça fait presque cinq ans qu’on vous en parle dans nos gazettes, à chaque rebondissement. Ce qu’il s’est passé depuis 2018 : réquisition citoyenne d’une école vétuste appartenant au diocèse, procès et appel...

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IT MUST BE HEAVEN

Écrit et réalisé par Elia SULEIMAN - France / Palestine 2019 1h27 VOSTF - avec Elia Suleiman, Tarik Kopty, Kareem Ghneim, Ali Suliman, Grégoire Colin Gael Garcia Bernal... Festival de Cannes 2019 : Mention spéciale du Jury • Prix Fipresci de la critique internationale.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

IT MUST BE HEAVENC'est une œuvre singulière, secrète et accueillante, merveilleusement drôle en même temps qu'éminemment politique et offrant de multiples niveaux de lecture. Suleiman se moque de toutes nos contradictions – et des siennes. Il excelle dans le domaine de la dérision, de l’auto-dérision salutaire. Une fois de plus, le cinéaste interprète d'ailleurs lui-même son alter ego autant onirique que réel. Existe-t-il une part d’autobiographie dans le récit ? Quelle est la part d’affabulation ? Qu’importe ! Ce qui est vrai, c’est le regard décalé de l’artiste sur le monde, son art de l’extrapolation, servi par une mise en scène magistrale. Chaque cadre est un authentique bijou de composition, l’image est splendide, tirée à quatre épingles (il faut préciser que son directeur de la photographie est Sofian El Fani, celui de La Vie d’Adèle, de Timbuktu…).

Ça commence par une histoire à rebondissements autour d’un citronnier en Palestine. Alors qu’Elia vient de trier quelques vieilleries dans la maison encore endeuillée de sa mère et qu’il prolonge ses rêveries dans un verre de vin, son oreille est attirée par un bruit dans le jardin. Il surgit alors tel un suricate derrière la balustrade du balcon. Surpris, son voisin, qui s’était introduit en catimini dans le jardin maternel pour le dépouiller de ses citrons, se transforme en moulin à paroles comblant le silence laissé par Elia qui l’observe de ses grands yeux étonnés, son éternel chapeau vissé sur la tête. Entre deux épisodes à répétition de cette mésaventure qui va devenir de plus en plus croustillante, se grefferont une cascade de saynètes drolatiques : la cavalcade effrayante et risible d’hommes armés dans une rue déserte, le repas terne d’une jeune femme prise en sandwich entre un inénarrable duo de frères barbus…
Si le premier tiers de l’action prend vie dans la cosmopolite Jérusalem, elle va s’envoler finement vers d’autres capitales. Paris tout d’abord où notre homme mutique regarde passer des femmes irréelles, comme tombées de gravures de modes, un sans-papiers poursuivi par une horde de flics, un défilé du 14 juillet auquel une moto-crotte emboite le pas, un char orphelin déambulant de façon improbable, le ballet d’éboueurs noirs ou celui de touristes asiatiques… Paname sage comme une image de carte postale, vidée de ses citoyens, de sa substantifique moelle… Viendra ensuite le tour de New York, ses checks points, ses étals de légumes qui la font ressembler à un souk. Le bougre se joue des clichés, s’en gargarise, greffant des éléments ubuesques qui évoquent le fantôme de son pays. Chaque plan extrêmement chorégraphié nous parle en creux du conflit israélo-palestinien, dresse une critique inquiète de l’inflation sécuritaire, du climat de tension mondial.

Si on a pu croire un instant le scénario inexistant, il se révèle au contraire extrêmement bien ciselé jusqu’à faire transparaitre en filigrane une thématique puissante qui va relier ces paraboles contemporaines, tour à tour burlesques ou poétiques, entre elles. Avec une ténacité toute balzacienne, Elia Suleiman compose sa propre comédie humaine, caustique, désabusée. Ses mines taquines, incrédules, questionnent ce qu’on appelle nos civilisations. Elles mettent en relief la bêtise des hommes, leur sauvagerie, leur égoïsme. Chaque silence se fait éloquence, tandis que le cinéaste promène son regard sans parole sur un monde devenu fou qu’il réenchante malgré tout.
It must be heaven se traduit évidement par « ce doit être le paradis ». Le constat est cinglant : si tant est qu’il existe, il n’est pas sur cette terre.