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La Paix, éternelle Utopie ?
Pas facile de décrypter le chaos du monde pour les spectateurs, plus ou moins lointains, que nous sommes, face aux faits tragiques qui nous submergent en avalanche via la presse, les réseaux sociaux, vraies ou fausses nouvelles… Et c’est dans ces moments-là que nous avons encore plus envie de croire...

LES SALLES UTOPIA SE METTENT AU VERT
Vous y croyez, vous, au bon sens qui voudrait que partir se bronzer les fesses à l’autre bout du monde  avec des avions Macron volant avec du bio kérozène made in France serait bon pour votre corps et la planète ? Cela ne ressemblerait-il pas étrangement au discours tenu il y a quelqu...

Justine Triet parle d’or
Il aura donc suffi de quelques mots, à peine, pour que la Ministre de la Culture, celui de l’Industrie, quelques maires et députés de la majorité, volent dans les plumes et la palme de Justine Triet, réalisatrice couronnée d’Anatomie d’une chute, sermonnant en substance : « ce n’est pas bi...

Rosmerta continue ! Vous connaissez l’histoire ? 
Depuis les débuts, et même avant, Utopia Avignon suit l’histoire de près ! Ça fait presque cinq ans qu’on vous en parle dans nos gazettes, à chaque rebondissement. Ce qu’il s’est passé depuis 2018 : réquisition citoyenne d’une école vétuste appartenant au diocèse, procès et appel...

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RIVER OF GRASS

Écrit et réalisé par Kelly REICHARDT - USA 1994 1h14 VOSTF - avec Lisa Bowman, Larry Fessenden, Dick Russell, Stan Kaplan, Mickaël Buscemi...

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

RIVER OF GRASSQuel plaisir de voir sur grand écran le premier long métrage, jusque là inédit, de la très talentueuse Kelly Reichardt : Old joy, Wendy et Lucy, La Dernière piste… Dès les première images, River of grass affirme tranquillement ce qui campera son style, « ce minimalisme qui va à l'os, l'âpreté de sa beauté, sa manière d'humaniser plutôt que d'héroïser la réalité… » (J. Mandelbaum, Le Monde). La brillante cinéaste américaine définit elle-même ce « Rivière d'herbe » comme un « road movie sans route, une histoire d’amour sans amour, une aventure criminelle sans crime ». C’est exactement ce qu’il est.

Cozy traîne les pieds dans une vie sans âme, sans aspirations. Certaines se contenteraient de pouponner béatement. Une routine sans joie à une époque où on élève déjà les bébés avec du coca-cola dans le biberon. Cozy (prénom choisi par son père policier en hommage à un vieux jazzman) regarde ses gosses pour ce qu’ils sont : des corps étrangers fatigants. Sans doute aimerait-elle faire comme sa propre mère, les abandonner entre les pognes paternelles pour aller vivre une existence qui serait enfin la sienne. Elle s’imagine alors danseuse, gymnaste, acrobate… qu’importe ! Un truc qui la mette sur le devant de la scène, loin des langes à laver, des jouets à ranger. Alors pour tromper son ennui, une fois la marmaille au lit, elle s’évade en silence, pomponnée comme une adolescente mal dégrossie, et file au pub boire un couple de bières. C’est sans surprise. Toujours les mêmes têtes, les même regards perdus au fond des verres. L’ivresse peine à faire oublier la vacuité de la petite ville perdue dans les Everglades, au fin fond de la Floride. Les comtés de Broward et de Dave (où la réalisatrice passa son adolescence) semblent noyés dans l’oubli des étendues marécageuses qui les morcellent, les laissant informes sur le bas côté du progrès. La caméra a beau ne pas lâcher ses protagonistes, le personnage principal crève l’écran, c'est cette Amérique profonde qui se construit sur un terreau d’inégalités.
Mais ce soir-là au bar ne sera pas complètement ordinaire. Ce soir-là, Cosy rencontre Lee, une petite frappe sans envergure. Sans l’avoir prémédité, voilà l’étrange duo, plus « bras cassés » que Bonnie and Clyde, qui part en cavale : destination inconnue et avenir incertain. Nos deux tourtereaux de fortune vont bientôt être rattrapés par la réalité, l’ironie de leur sort sans gloire. D’autant que leurs mondes sont petits et qu’ils ont déjà plus de points en commun qu’ils ne l’imaginent…

Le film, jamais complaisant, est d’une modernité remarquable. Cette production ultra-indépendante, faite de bric et de broc, traverse les années sans une ride. River of grass a pu exister, à l’époque, grâce aux rencontres de hasard, la foi de quelques techniciens à la retraite reprenant du service pour servir le projet irrévérencieux d’une jeune réalisatrice alors inconnue. Le film est le fruit de dix neuf jours de tournage, dans une quasi clandestinité, des conditions impensables à Miami qui se vantait pourtant d’accueillir à bras ouvert les productions de films, mais pas les plus fragiles, visiblement. Il aura fallu une bonne dose d’enthousiasme et de détermination à chacun pour résister aux intimidations de la police locale. Heureusement, le père de Kelly, qui en faisait partie (tiens, tiens : comme celui de Cosy !), était là pour les tirer des plus mauvais pas. S’il ne fait donc aucun doute que ce premier opus soit tiré de l’expérience personnelle de Kelly Reichardt, on reste bluffé par sa distanciation salutaire, loin de tout sentimentalisme facile. Reste qu’on s’amuse à imaginer la réalisatrice obligée d’aller chaque premier lundi du mois à confesse, en s’inventant de faux péchés.