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30237
Et voilà, Vidéo en Poche c’est fini, le compteur s’arrête à 30237 copies vendues sans DRM sur clés USB ! À bientôt dans le cyberespace indépendant et surtout IRL dans les salles de cinéma :)Le 30 novembre à minuit, Vidéo en Poche a tiré sa révérence et retourne dans sa bouteille de ...

Stop Bolloré ! L'appel du collectif
Le collectif Stop Bolloré a vu le jour en décembre 2021 et rassemble des membres et des organisations de la société civile qui s’inquiètent de la concentration des médias et de l’édition en France et des dangers que cela représente pour la démocratie. Le projet du collectif, qui est poli...

Quiz des "trente dernières secondes" du n°101 au n°117
Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°101 au n°117   Samedi 17 avril Hier, fin N° 101. Juliette Binoche, 30 ans plus tard, et magnifique, dans un autre de ses plus beaux rôles. La musique, c’est le célébrissime Canon en ré majeur de Johann Pa...

Quiz des "trente dernières secondes" du n°51 au n°100
Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°51 au N°100 //////////////////////////////////////// Vendredi 26 février  Hier, fin N° 51. Saisissante. Tout comme l’est la séquence d’ouverture du film, qui montre la jungle s’enflammer sous les bombes a...

N’ATTENDEZ PAS TROP DE LA FIN DU MONDE

Écrit et réalisé par Radu JUDE - Roumanie 2023 2h43mn VOSTF - avec Ilinca Manolache, Ovidiu Pîrșan, Nina Hoss, Dorina Lazar...

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

N’ATTENDEZ PAS TROP DE LA FIN DU MONDERarement, on aura vu un film aussi explosif, provocateur en même temps que furieusement drôle et malin. N’attendez pas trop de la fin du monde est un portrait satirique de la Roumanie contemporaine, comme écrit sur du papier de verre. Ça racle, ça invective, ça interpelle… Le noyau hautement inflammable du film, c’est Angela, véritable électron libre, qui travaille comme assistante de production dans une société audiovisuelle. Le film l’accompagne dans Bucarest du matin au soir. La force du cinéma de l’iconoclaste Radu Jude : par des matériaux filmiques divers et des effets de rapprochements inattendus, provoquer une réflexion profonde sur l’évolution de son pays, encore sous la dictature il y a trente ans et pris dans le tourbillon du libéralisme depuis. Il en résulte une drôle de société où l’agressivité et l’individualisme s’expriment sans retenue. Une brutalité qu’Angela retourne à la face du système avec tout autant de frontalité et par tous les moyens disponibles : gestes, paroles, pensées… La prestation d’Ilinca Manolache, qui incarne Angela, ne tient plus de l’interprétation mais de la performance dans ce film résolument punk et totalement jubilatoire !

Ça démarre au quart de tour. Le réveil sonne et la minute d’après, Angela, cheveux teints en blonds, enfile culotte, baskets et robe à paillettes. Le tout en lâchant une bordée d’injures. Prête ! En voiture. Sa mission de la journée : recueillir les témoignages d’accidentés du travail afin de sélectionner ceux qui apparaîtront dans un spot commandé par une multinationale allemande fabriquant des machines industrielles. Soi-disant pour sensibiliser à la sécurité au travail. Ça sent l’hypocrisie à plein nez, Angela n’est dupe de rien. On passe donc un certain temps sur le siège passager à se rendre dans les quartiers populaires de Bucarest. Les routes sont un véritable concentré de misogynie et d’agressivité. Au volant, la radio à fond, Angela ne se laisse jamais faire, répond absolument à toutes les attaques, profère une quantité astronomique d’insultes tout en téléphonant pour gérer ses problèmes de boulot quotidien. Et puis, passées ces traversées chaotiques, Angela rentre dans les appartements, accède à l’intimité des gens qui lui déroulent modestement leurs histoires, le récit de leur accident et comment ils essaient de s’en sortir depuis. Soudain, elle se met à l’écoute. Sans angélisme et avec ce qu’il faut d’empathie, elle filme, questionne, bavarde un peu, puis repart.

En parallèle, on découvre rapidement la lubie d’Angela : poster sur les réseaux sociaux de courtes vidéos où, grâce à un filtre, elle se filme en homme crâne rasée, barbichette et gros sourcils, parangon de la masculinité toxique, débitant les pires insanités sur ce qu’elle croise, avec une vulgarité hors catégorie. Ces vidéos, summum du mauvais goût, agissent comme autant de petits commentaires politiques aussi savoureux qu’acides de la réalité vécue par Angela. Elles sont aussi un des biais par lesquels Radu Jude construit une réflexion ultra – pertinente sur les systèmes de représentation par l’image. À ce titre, le film est ponctué d’extraits d’un film en couleurs de 1981 de Lucian Bratu qui suit une femme chauffeur de taxi, également prénommée Angela, et ses rencontres quotidiennes dans le Bucarest de Ceausescu. Effet de miroir saisissant qui donne une profondeur étonnante aux images en noir et blanc des déambulations de l’Angela « actuelle ». À l’autre bout du spectre, la fin du film change une nouvelle fois de peau dans un génial plan-séquence qui décortique la façon dont l’esthétique publicitaire parvient à tout vider de sens, évidemment au détriment de la vérité et de la représentation des victimes. Avec la satire comme principe et le dépiautage des systèmes de représentation comme moyen, N’attendez pas trop de la fin du monde est une farce décapante sur la grossièreté du capitalisme, une fulgurante pépite, tranchante comme une lame.