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LE PROCÈS DE L’HERBORISTE

(Charlatan) Agnieszka Holland - Pologne / République Tchèque 2021 1h58mn VOSTF - Avec Ivan Trojan, Josef Trojan, Juraj Loj, Jaroslava Pokorná...

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

LE PROCÈS DE L’HERBORISTED’une part, et ce n’est certes pas le Professeur Raoult qui nous contredira, du Père Antoine à Raspoutine, de Nostradamus à Jésus, il n’y a jamais très loin des nues au pilori, ni du messie au charlatan. Question de point de vue. D’autre part, un bienfaiteur, un individu qui est capable d’utiliser ses dons au profit de l’humanité toute entière, sans distinction de peau, de sexe, de rang social ou de morale, tout généreux et sincère qu’il soit, n’est pas nécessairement quelqu’un de sympathique, ni de foncièrement bon, ni de recommandable. Enfin, la question du catalogage entre messie et charlatan est évidemment à géographie variable. Selon l’époque, selon que vous êtes puissant ou misérable, ce n’est évidemment pas la même chanson. Selon l’autorité que ses protections politiques confèrent à un individu, ou la direction dans laquelle souffle le vent de l’Histoire ; selon que ses mœurs troublent ou non ses contemporains… étonnante personnalité, stupéfiant personnage, que l’herboriste Jan Mikolášek, qu’éclaire sans parvenir à totalement le cerner (sans même y prétendre d’ailleurs) le film de Agnieszka Holland.



Hiératique, insaisissable, Jan Mikolášek traverse la première moitié du XXe siècle et l’histoire de la toute jeune Tchécoslovaquie, avec ses mélanges de plantes, les infusions qu’il prescrit, et les yeux rivés sur une théorie d’échantillons d’urines, à la seule observation desquelles il a appris à diagnostiquer les maux de la cohorte de patients qui se présentent quotidiennement à lui, en consultation comme en pèlerinage, toujours plus nombreux. Jeune garçon, il a instinctivement sauvé, avec un cataplasme improbable d’herbes, la jambe de sa sœur qu’on allait amputer. Plus tard, avec abnégation, convaincu d’avoir hérité d’un don, il a appris auprès d’une guérisseuse les rudiments de l’herboristerie, la lecture des flacons d’urines troublés, diversement teintés ou maculés de dépôts par diverses affections… et son talent s’est affirmé. Après l’anéantissement de la République tchèque, sous l’occupation allemande, il perfectionne sa technique. Et inlassablement, toujours insaisissable, soigne indifféremment les dignitaires nazis et les résistants. Sa renommée grandit, des files de patients toujours plus longues se pressent devant son cabinet – qui est devenu une propriété luxueuse. Aux nazis, défaits, ont succédé les dignitaires communistes. Mais la médecine non-conventionnelle prodiguée par cet homme incernable se marie mal avec le matérialisme absolu érigé en système politique. Lui semble traverser l’époque sans la voir, muré en lui-même, inaccessible aux tourments du monde qui l’entoure – si ce n’est aux maux de ses contemporains qu’il peut seuls soulager. Dit-il. L’humanité lui vient de son assistant, František. Énigmatique, d’une absolue fidélité, il est aussi l’amour de sa vie, dans lequel, enfin, le charlatan, l’herboriste, parvient à s’oublier. Il est sa rédemption, sans aucun doute, et d’une certaine façon l’artisan de sa chute.

Malgré tout, violent, manipulateur, bigot jusqu’au dolorisme (il a les genoux en sang à force de pénitence au pied de la croix), d’un narcissisme démesuré, Agnieszka Holland brosse le portrait d’un homme torturé, rongé par des désirs, des passions inavouables qui butent contre sa foi mégalomane – foi religieuse, mais surtout, avant tout, foi en lui-même. Dans un film d’une construction sèche, rigoureuse, tout en lumières grisées, en lignes claires et acérées qui dessinent un carcan mental à l’équerre, à mi-chemin entre le kaléidoscope et la toile d’araignée, elle raconte la monstrueuse humanité de l’individu qui se croit devenu un dieu confronté à la violence rageuse du système politique qui va, puisque procès il doit y avoir (c’est dans le titre), s’ingénier à le broyer. Quelques mois à peine après L’ombre de Staline, Agnieszka Holland signe un film fort et intimiste, qui est à nouveau le portrait d’un homme, à l’héroïsme cette fois moins manifeste, en lutte contre un système oppressif.