UTOPIA SAINTE BERNADETTE
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Coopérative QUI VIVRA BÉRAT habitat partagé en évolution la Ménardière
Une autre façon de vivre ? Une autre façon de vieillir ? Voilà 4 ans, qu’un groupe de retraités a investi le Domaine de la Ménardière en créant une coopérative. Objectif : Vivre et vieillir ensemble solidaires et actifs jusqu’au bout du chemin. Chambres d’hôtes, Conc...

SÉANCES BÉBÉS
  Les séances “bébé” sont des séances où les parents peuvent venir avec leur nouveaux nés. Et déguster un film pendant qu’ils roupillent dans leurs bras. Les séances sont évidemment ouvertes à tous les spectateurs, il suffit de savoir qu’il peut arriver qu’un bébé fasse du bruit en suçant son pou...

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Et voilà, Vidéo en Poche c’est fini, le compteur s’arrête à 30237 copies vendues sans DRM sur clés USB ! À bientôt dans le cyberespace indépendant et surtout IRL dans les salles de cinéma Le 30 novembre à minuit, Vidéo en Poche a tiré sa révérence et retourne dans sa bouteille de la...

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LES INTRANQUILLES

Écrit et réalisé par Joachim LAFOSSE - Belgique / France 2021 1h58mn - avec Leïla Behkti, Damien Bonnard, Gabriel Merz Chammah, Patrick Descamps...

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

LES INTRANQUILLESOn pourrait reprendre ici les mots écrits dans notre gazette à propos de L’Économie du couple, précédente réussite majeure de Joachim Lafosse : « C’est un film magnifique, écrit à plusieurs mains et autant de sensibilités, impliquant également les comédiens qui ont eu leur mot à dire, modifiant parfois leur texte pour se l’approprier, et le rendu final est saisissant : il y a quelque chose de profond et de fort qui tient sans doute au vécu de chacun, à la connivence qui s’est établie au cours du tournage et leur a permis d’appréhender de l’intérieur des personnages qui immédiatement nous parlent, nous concernent, nous touchent durablement. » Le processus est cousin pour Les Intranquilles, le résultat tout aussi saisissant. Chaque acteur, actrice donne son prénom au personnage qu’il incarne, ce qui conduit d’emblée à une grande réactivité, à une forme de véracité troublante. Dans la vraie vie, ils pourraient ressembler à leurs alter ego, expérimenter leurs failles, leurs errances. Les voilà, fragiles funambules, avançant sur le fil ténu qui sépare l’amour de la haine, la normalité de la folie, celle où l’on peut tous basculer d’un instant à l’autre.


D’emblée le film attaque par une première scène joyeusement déstabilisante. Le temps est radieux. Damien est à la barre, son petit Amine sourit aux anges : père et fils partagent un moment de connivence entre garçons, près des côtes, dans le bateau à moteur familial. Puis sans crier gare Damien plonge à l’eau, affirmant qu’il va rentrer à la nage, et exhorte le garçonnet à conduire seul l’embarcation vers une plage qu’on n’aperçoit même pas. Amine s’exécute, l’air inquiet mêlé d’une sorte d’excitation. Le mouflet, dans ce bateau trop grand pour lui, dans cette immensité aqueuse, semble d’autant plus petit, si petit… Est-ce bien raisonnable ? N’est-ce pas dangereux ? Le père prend-il vraiment la mesure de ce qu’il demande à sa progéniture ? Serait-ce pour lui une sorte de rite initiatique ? On pourrait y voir un message : « Tu seras un homme mon fils… » Leila, la mère, restée sur la plage, se tord longtemps les mains d’inquiétude, tout en la dissimulant, scrute désespérément l’horizon en résistant à l’affolement – légitime au demeurant.

On a tôt fait de comprendre que l’acte de Damien n’est pas isolé, chaque minute qui passe révèle d’autres excentricités, d’autres surprises intenses. Jamais le quotidien de la petite famille n’est ce long fleuve tranquille qui permet de s’endormir sereinement en se laissant bercer par des flots constants. Mais, du moins, on ne s’ennuie jamais. Damien est drôle, imaginatif, agité, dissident, inspiré… Travailleur infatigable quand il s’attèle à peindre ses toiles. Un véritable artiste qui a besoin d’être dans l’excès pour créer. Du moins c’est ainsi qu’un œil extérieur pourrait le décrire. Damien est aussi un homme qui s’épuise tout en épuisant son entourage. Un diagnostiqué bipolaire qui ne parvient pas à accepter son état. Un compagnon que Leila porte à bout de bras jusqu’à l’épuisement de son stock de patience et de tendresse… Et quand plus rien ne va, elle appelle à la rescousse Patrick, le père de Damien… Sans commentaire, tous ont l’intelligence de ne pas s’adonner à l’autoflagellation, aux reproches, à la tentation de chercher des fautifs. Économisant les mots, sans effusions inutiles, ils ménagent leurs forces pour faire bloc, solidaires, autour de ce créatif aussi déjanté qu’extraordinaire, dans l’attente de ses prochaines (re)plongées dans ses gouffres de folie où nul ne peut l’atteindre. Il ne reste qu’à attendre sans espérer d’avenir meilleur, de rémission illusoire, en se méfiant des rêves et de leur lot de déceptions. Les ondes de chocs qui s’en suivront propageront l’intranquillité dans les zones encore épargnées, jusqu’au delà de l’écran, dans le cœur même des spectateurs, tout aussi inquiets, attendris et impuissants que les protagonistes si loin, si proches de nous mêmes et tellement attachants…