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LES CRIMES DU FUTUR

Écrit et réalisé par David CRONENBERG - Canada 2022 1h47mn VOSTF - avec Viggo Mortensen, Léa Séydoux, Kirsten Stewart, Welket Bungué... Sélection officielle, en compétition, Festival de Cannes 2022. Probablement interdit aux moins de 12 ans, voire de 16.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

LES CRIMES DU FUTURQue les héros du nouveau film de David Cronenberg soient un couple d’artistes du body art est presque un aboutissement logique. Car le corps dans tous ses états, c’est l’une des grandes affaires du cinéaste canadien, qui reprend ici au pied de la lettre le concept volontiers vaporeux de « beauté intérieure », en allant crûment chercher le sublime dans les entrailles.
Chirurgienne de formation, Caprice (Léa Seydoux) collabore étroitement avec son compagnon, l’artiste d’avant-garde Saul Tenser (Viggo Mortensen). Télécommandant le bistouri avec la dextérité d’une calligraphe, elle lui ouvre le corps lors de performances organisées devant un public fervent. Leur but est d’extraire les nouveaux organes qui se sont mystérieusement développés à l’intérieur de Saul. Ces créateurs vivent dans un monde obscur et désert, qui semble avoir été dévasté par la guerre ou une catastrophe liée au dérèglement climatique. Un univers où le corps humain, en train de muter, est soumis à une surveillance accrue. Ainsi deux bureaucrates travaillant pour le Registre national des organes (sic)s’intéressent de très près au couple. Par ailleurs, une brigade des mœurs enquête tandis qu’une organisation clandestine organise un étrange trafic…

Les Crimes du futur oscille entre polar et science-fiction, mais à des années-lumière du blockbuster rutilant. On ne voit quasiment pas la lumière du jour et la plupart des scènes se déroulent dans des intérieurs vides ou désaffectés, où traînent de vieux objets et de la paperasse. C’est avec le minimum de moyens et d’effets spéciaux, dans un esprit de série B bricolée proche de ses débuts, que Cronenberg livre une leçon de cinéma captivante. En témoignant d’un imaginaire plastique délirant, à travers des innovations technologiques qui sont des personnages en soi, entre l’organique et l’animal. Citons cet « orchibed » dans lequel Saul Tenser se love pour se ressourcer : un lit en coquille de noix molle (ou en carapace d’insecte ?) suspendu au plafond par des sortes de pattes. Ou bien ce « breakfaster », fauteuil mouvant qui semble fait d’os en cire !
Ces accessoires fantasques sont des extensions du corps de Saul. Lequel, entre difficulté à déglutir et paralysie du bras, manifeste peu à peu les signes d’un mal qui se confond avec ses créations. C’est la belle idée transgressive et cathartique du film : faire de la maladie un moyen d’avancer et de s’élever. À deux. Puisque Saul forme avec sa femme un couple soudé, qui fait tout ensemble, rendant caduque la distinction muse/pygmalion. Tout de noir vêtu avec capuche, tel un moine médiéval, lui reste le plus souvent tapi dans l’ombre, tandis qu’elle est associée à la lumière. Caprice est à la fois garde-malade, ange gardien, metteuse en scène, partenaire. De travail comme de sexe, Cronenberg revisitant les fameuses noces d’Eros et de Thanatos, en utilisant la chirurgie et une étrange machine à autopsier comme tremplins vers l’orgasme. À ce titre, le film ne manque pas d’ironie : voir la scène où la bureaucrate ardente (Kristen Stewart) tente d’embrasser Saul, qui se recule, s’excusant « de ne pas être très doué en vieux sexe ».

Le film marque par son sens envoûtant de la cérémonie crépusculaire, où se mêlent le sacré et le sacrilège. Entre infanticide, détournement de cadavre, scarifications et cicatrices baroques, Les Crimes du futur est violent mais d’une violence calme, conceptuelle. Le cinéaste continue de faire réfléchir sur des oppositions – peau/profondeur, forme/fond, progrès/déclin. Il a surtout la suprême audace de dépasser la noirceur extrême pour faire luire malgré tout sa foi dans l’homme et son aptitude à se réinventer – y compris en l’imaginant capable de digérer des déchets toxiques. C’est à travers ce type de visions que Cronenberg est un génie hérétique.

(J. Morice, Télérama)