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30237
Et voilà, Vidéo en Poche c’est fini, le compteur s’arrête à 30237 copies vendues sans DRM sur clés USB ! À bientôt dans le cyberespace indépendant et surtout IRL dans les salles de cinéma :)Le 30 novembre à minuit, Vidéo en Poche a tiré sa révérence et retourne dans sa bouteille de ...

Stop Bolloré ! L'appel du collectif
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Quiz des "trente dernières secondes" du n°101 au n°117
Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°101 au n°117   Samedi 17 avril Hier, fin N° 101. Juliette Binoche, 30 ans plus tard, et magnifique, dans un autre de ses plus beaux rôles. La musique, c’est le célébrissime Canon en ré majeur de Johann Pa...

Quiz des "trente dernières secondes" du n°51 au n°100
Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°51 au N°100 //////////////////////////////////////// Vendredi 26 février  Hier, fin N° 51. Saisissante. Tout comme l’est la séquence d’ouverture du film, qui montre la jungle s’enflammer sous les bombes a...

BUSHMAN

Écrit et réalisé par David SCHICKELE - USA 1971 1h15mn VOSTF - avec Paul Eyam Nzie Okpokam, Elaine Featherstone, David Schickele, Jack Nance...

Du 08/05/24 au 27/05/24

BUSHMANIl aura fallu attendre plus de cinquante ans pour découvrir ce film indépendant américain, véritable pépite de la contre-culture de l’époque. Bushman, avec une énergie et une grâce folles, vient documenter les mouvements de contestation qui, à partir de 1968, réveillent une partie de la jeunesse du pays.
Né de l’amitié entre David Schickele, jeune réalisateur américain blanc, et Paul Okpokam, jeune intellectuel africain réfugié aux USA – ils se sont rencontrés deux ans plus tôt au Nigéria, sur le tournage d’un documentaire de Schickele –, Bushman a été tourné dans la ville de San Francisco, secouée alors par des mouvements politiques, sociaux et culturels inédits qui vont façonner le visage de l’Amérique des années 1970.

À la frontière du documentaire et de la fiction, Bushman charme dès la scène d’ouverture dans laquelle nous découvrons Gabriel (Paul Okpokam donc), immigré nigérian qui fait de l’auto-stop au bord d’une autoroute sous un soleil de plomb, ses chaussures en équilibre sur la tête, avant qu’un biker tout droit échappé du tournage d’Easy rider décide de s’arrêter et de l’aider. Alors que la guerre du Biafra fait rage au Nigeria, Gabriel a fui la famine qui ravage son pays. Il veut s’installer en Amérique et vient de débarquer comme étudiant dans l’université de San Francisco. À la manière d’une odyssée contemporaine, le film accompagne Gabriel dans ses errances et ses rencontres (amicales ou amoureuses) en tout genre. Sa voix intérieure est notre guide, confiant son sentiment d’exil alors que se succèdent à l’écran scènes de la vie urbaine californienne et souvenirs d’enfance dans son village natal en Afrique.

À San Francisco, notre homme de la brousse (« bushman » désigne les membres des peuples nomades habitant le désert du Namib, en Namibie) est l’objet des regards curieux des hippies, issus en grande partie de la bourgeoisie blanche, qui disent l’accueillir à bras ouverts, en frère, mais le traitent avec un réel sens de l’inégalité, tout en suscitant la méfiance de la communauté afro-américaine, à qui il apparaît également assez « différent », malgré sa couleur de peau. On lui demande de dire quelques mots de dialecte africain, de danser… Mais Gabriel tient bon et répond avec humour, décalant toujours d’un cran la place où on veut l’assigner, naviguant ainsi avec philosophie entre racisme ambiant d’un côté et militantisme sous influence Black Panthers de l’autre.
Dans une des plus belles scènes du film, Gabriel et sa petite amie Alma conversent, couchés sur le comptoir d’un bar. Elle tente de lui enseigner les inflexions du parler afro-américain, sans succès, puis se lance dans un monologue plein de tristesse décrivant son enfance dans le quartier de Watts. Une description improvisée qui nous en dit plus sur la condition des femmes noires que n’importe quel texte sociologique. Ainsi confrontée à cet « étranger » incernable, l’Amérique se dévoile sans fard, tiraillée entre engagement et désenchantement. Pourtant Gabriel espère s’intégrer au « rêve américain ». C’est là que la réalité dans toute sa violence rattrape inopinément la fiction : « Un jour, nous attendions Paul Okpokam pour le tournage. Il était habituellement très ponctuel. Une demi-heure s’est écoulée, puis une heure. Finalement, un ami nous fit savoir que Paul avait été arrêté à l’université… » témoigne le réalisateur David Schickele.

Grâce à une image noir et blanc magnifique signée David Myers (bientôt chef opérateur de THX 1138 de George Lucas), un sens du cadrage et du montage très aiguisé, une utilisation virtuose de la musique – dont une scène de danse mémorable sur le Respect d’Aretha Franklin –, Bushman est un condensé d’énergie vibrante où l’influence et la liberté de filmer d’un John Cassavetes se fait très fortement sentir. Un regard lucide et poétique sur l’Amérique des années 60 alors que la colère allumait les émeutes des ghettos et des campus.