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EMMETT TILL

Chinonye CHUKWU - USA 2022 2h12mn VOSTF - avec Danielle Deadwyler, Jalyn Hall, Whoopi Goldberg, Sean Patrick Thomas... Scénario de Michael Reilly et Keith Beauchamp.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

EMMETT TILLD’après l’histoire vraie d’Emmett Till, assassiné à 14 ans parce qu’il aurait sifflé une femme blanche dans le Mississippi de 1955. Sa mère Mamie Till-Mobley bouscule les consciences en insistant, lors des obsèques, pour que le cercueil de son fils reste ouvert et que l’opinion publique comprenne l’horreur qu’il a subie.

Le fait qu’il ait fallu attendre le 29 mars 2022, soit 67 ans après la mort d’Emmett Till, pour que soit promulguée une loi fédérale prohibant tout acte de lynchage, qualifiant cette pratique de crime de haine, est un indicateur non seulement du dysfonctionnement politique mais aussi des forces obstructives du sectarisme et du racisme qui enveniment l’Amérique. L’assaut du Capitole par des partisans d’extrême droite de Donald Trump, le 6 janvier 2021, rappelle combien la démocratie états-unienne est plus que jamais menacée par le suprémacisme blanc et ses suppôts. Il semble alors vital d’en revenir à la tragique histoire d’Emmett Till, qui traduit l’énergie ambivalente d’un peuple capable des pires exactions comme des plus grands combats, à l’instar de celui de Mamie Till-Mobley. Dans un acte de bravoure inouï, cette mère a forcé l’Amérique à faire face au meurtre de son fils, en présentant son cercueil ouvert aux médias du monde entier : « Cette odeur, c’est le corps de mon fils, empestant la haine raciale ».



Avant l’horreur, il y a Emmett qui fredonne, toujours vif et de bonne humeur, avec un sens exquis du style, le sourire chaleureux. L’adolescent n’a qu’une hâte : partir pour la première fois en voyage dans le Mississippi, où il séjournera chez son oncle, sa tante et ses cousins. Son impatience rieuse contraste d’emblée avec l’inquiétude de sa mère, Mamie. Elle sait bien que les Blancs là-bas attendent et exigent des Noirs qu’ils soient déférents et soumis, sous peine de mort. Une fois dans le train, à l’approche de la ligne Mason-Dixon, Emmett regarde hébété les passagers noirs quitter leurs sièges pour se parquer ensemble à l’arrière du train. Cette ségrégation brutale est annonciatrice d’un changement d’univers, d’un voyage sans retour. Quelques jours plus tard, le corps d’Emmett sera découvert flottant dans les eaux du Tallahatchie. Son visage est si défiguré qu’on peine à le reconnaître. Nul besoin de dépeindre le meurtre à l’écran (ce que le film évite avec beaucoup de pudeur) pour le faire exister pour ce qu’il est : abominable.

Commence alors le combat d’une mère pour rendre justice à son fils, dont l’assassinat galvanisera des générations entières d’activistes, telle la NAACP (principale organisation de défense des Afro-Américains). La réalisatrice Chinonye Chukwu en restitue toute la force, l’émotion brute et déchirante. On pense notamment à cette scène où Mamie témoigne devant un tribunal factice et partial, la caméra figée sur son visage. Si le fait d’incriminer les bourreaux d’Emmett semble à ce stade vain, c’est en revanche la possibilité de se penser et de se définir comme sujet intrinsèquement politique qui commence précisément ici à prendre forme. Tout du long, Danielle Deadwyler livre une performance physique, vitale, absolue, en mère endeuillée qui transmue son chagrin en voix fédératrice de toute la communauté noire. Tel un spectre du temps, le cinéma réactive à jamais sa lutte salutaire, que ne tarderont pas à rejoindre d’autres très grandes militantes, comme Angela Davis et Bell Hooks, entre autres.

(O. J., magazine V.O.)