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JEUNESSE (LE PRINTEMPS)

WANG BING - documentaire Chine 2023 3h32mn VOSTF -

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

JEUNESSE (LE PRINTEMPS)Après s’être confronté dans des œuvres magistrales au monde ouvrier du Nord-Est et du Nord de la Chine (on se souvient en particulier du monumental À l’ouest des rails, 2002), puis à la mémoire des camps de travail sous le maoïsme (Fengming, 2007, Le Fossé, 2008, Les Âmes mortes, 2018), le grand réalisateur chinois Wang Bing nous embarque avec Jeunesse (Le printemps) dans le monde des petits ateliers de confection de vêtements de la côte orientale chinoise, plus précisément dans la ville de Zhili (450 000 habitants), située à 150 kilomètres de Shanghai. Cette ville abrite 20 000 ateliers de confection de vêtements employant pas moins de 300 000 travailleurs temporaires ! Réputée pour sa spécialisation dans les vêtements pour enfants, la ville produit à elle seule deux tiers de la production nationale, soit 1,45 milliards de pièces de vêtements par an.

Mais oublions les chiffres vertigineux de l’industrie textile, reflet de la toute puissance commerciale de la Chine d’aujourd’hui, pour nous concentrer sur l’envers du décor, à savoir ces petites mains qui, de 8h à 23h, tous les jours (une soirée de repos par semaine à partir de 17h) s’affairent derrière leur machine à coudre, à des cadences terrifiantes, afin de tenir les délais de production. Dans Jeunesse, on plonge littéralement dans l’antre de ces ateliers de confection aux murs décrépits, éclairés par des néons sans vie, où travaillent sans relâche, dans le fracas des machines, plusieurs groupes d’ouvriers et ouvrières à peine sortis de l’adolescence. Le soir venu, abrutis de fatigue, ils s’entassent dans les dortoirs insalubres situés au-dessus des ateliers. Au petit matin, déjà ils calculeront combien de pièces ils pourront fabriquer dans la journée, et combien ils pourront gagner. Pourtant en y regardant mieux, dans les interstices de ce monde asphyxié de tissus et de béton, nappé d’un brouillard épais qui ne semble jamais quitter les rues de la ville, émerge la vie, comme un faisceau de lumière transperçant la nuit.
Tout à coup, et souvent dans un excès d’énergie et de fureur (de vivre), on blague, on se chamaille, on danse, on joue, on rigole et on se bagarre dans les ateliers. On écoute la musique très fort pour défier le bruit des machines et s’enivrer de pop chinoise aux paroles romantiques, réconfortantes, promesses d’un avenir meilleur. On se réunit et on s’organise pour tenter de faire fléchir les petits patrons de ces fabriques, irascibles et odieux, souvent peu scrupuleux quant aux conditions de travail imposées à leur sa main-d’œuvre. Dans le même temps, on tombe amoureux dans ces chambres de fortune, où la promiscuité entre filles et garçons réveille les désirs universels de l’adolescence.
Ainsi, malgré la fatigue infinie dictée par les rendements, les corps et les esprits entrent en résistance et s’affranchissent, même un court instant, de la répétition des gestes imposés par leur tâche, défiant ainsi la déshumanisation instaurée par le fonctionnement de ces cités-usines monochromes et carcérales, qui sont pourtant la seule opportunité de gagner rapidement de l’argent.
Dans ces ateliers, l’écrasante majorité des heures de la journée est passée à travailler. Les jeunes n’ont quasiment pas le temps de se reposer et ne peuvent pas quitter leur atelier. Les jeux, les flirts, les déconnades ou les affrontements, c’est leur stratégie pour supporter cette vie et alléger leur condition.

Fidèle à sa méthode d’immersion au long cours (le tournage s’est déroulé de 2014 à 2019), Wang Bing dresse le portrait de toute une génération – des « ouvriers-paysans » ou une « population flottante » comme on les appelle –, captant, avec un souci méticuleux du réel, une prodigieuse attention aux détails, l’intimité et la singularité de tous ces personnages, faisant de ce documentaire une œuvre majeure, solaire et engagée contre toutes les formes d’oppression.