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SANS JAMAIS NOUS CONNAÎTRE

(ALL OF US STRANGERS) Écrit et réalisé par Andrew HAIGH - GB / USA 2024 1h45mn VOSTF - avec Andrew Scott, Paul Mescal, Claire Foy, Jamie Bell... D’après le roman de Taichi Yamada.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

SANS JAMAIS NOUS CONNAÎTREÀ Londres, Adam vit dans une tour où la plupart des appartements sont inoccupés. Une nuit, la monotonie de son quotidien est interrompue par sa rencontre avec un mystérieux voisin, Harry. Alors que les deux hommes se rapprochent, Adam est assailli par des souvenirs de son passé et retourne dans la ville de banlieue où il a grandi. Arrivé devant sa maison d’enfance, il découvre que ses parents occupent les lieux, et semblent avoir le même âge que le jour de leur mort, il y a plus de 30 ans…
Dans 45 ans, réalisé par Andrew Haigh en 2015, un fantôme s’invitait lors de l’anniversaire de mariage du vieux couple formé par Charlotte Rampling et Tom Courtenay. On venait en effet de retrouver le corps de Katya, le premier grand amour de Geoff, disparue tragiquement en montagne un demi-siècle plus tôt. Katya avait été comme aspirée par une fissure dans la roche et sa réapparition, conservée dans la glace, devenait aussi mystérieuse que sa disparition. Celle des parents d’Adam dans Sans jamais nous connaître est plus banale (un accident de voiture, la nuit, après quelques verres), mais la résurgence des fantômes reste tout aussi troublante pour le personnage principal, interprété par le formidable Andrew Scott. Dans ces deux films, Haigh traite avec finesse d’un deuil, mais d’un deuil non-accompli.

Ce n’est pas spoiler que de dire que Sans jamais nous connaître parle de fantômes… Haigh utilise des outils fantastiques pour dépeindre ce qui, dans d’autres films, ferait l’objet de drames familiaux parfaitement réalistes…
Si le film a une dimension universelle (sur l’amour, le deuil, la solitude), Andrew Haigh raconte aussi quelque chose de spécifique sur l’expérience gay, qu’on a rarement vu exprimé ainsi. Ici, la redécouverte de la chambre d’un jeune ado gay peut éveiller une nostalgie, mais nous plonge aussi (surtout) dans la solitude propre aux enfants queer. Seul et enfermé dans sa chambre, seul dans une rame de métro, seul même en étant entouré. Le film traite de manière bouleversante des dynamiques familiales, de ce qui n’a jamais été dit, de ce qu’un adulte queer aurait aimé entendre en grandissant. Cela pourrait être trop littéral, mais Haigh trouve une alchimie magique entre ce qui est finalement articulé (les regrets et les incompréhensions d’un père et d’une mère vis-à-vis de leur gosse gay) et l’atmosphère irréelle, aux portes de l’abstraction et du grotesque.
« Tu n’as pas changé, c’est toujours toi », dit la mère à son fils retrouvé. « Tout a changé » affirme pourtant ce dernier, mais Adam croit-il seulement ce qu’il est en train de dire ? C’est là, en creux, la dimension politique du film : tout a changé (le mariage, l’adoption, le regard que porte la société) mais la solitude et le rapport cassé à la famille sont toujours actuels…

Sans jamais nous connaître parle de malaise et de mal-être jusqu’à être très dur, mais il le fait avec élégance : le film n’est jamais cruel envers ses personnages ou envers le public. Les sentiments débordent comme dans le choix de chansons particulièrement expressives, du mélodrame absolu de Frankie Goes to Hollywood (The Power of love) à l’explosion sentimentale des Pet Shop Boys (Always on my mind). Le choix d’artistes et de voix queer n’est pas anodin et souligne cette émotion directe procurée par une chanson pop… Les vieilles chansons queer sont elles aussi des fantômes qui enveloppent Adam. C’est une étreinte étrange, rappelant celle qui unit les personnages de Mysterious skin (Gregg Araki, 2004), autre grand film sur le trauma queer qu’Andrew Haigh cite ici le temps d’un plan marquant. Ample et ambitieux, Sans jamais nous connaître est une merveille qui, simultanément, console et brise le cœur.

(N. Bardot, lepolyester.com)