Soutenez Utopia Palmer LA GAZETTE
(à télécharger au format PDF)

NOUS TROUVER
(et où trouver la gazette)

NOS TARIFS :
TARIF NORMAL : 8€
CARNET D'ABONNEMENT : 55€ (10 places, non nominatives, non limitées dans le temps, et valables dans tous les Utopia)
Séance sur fond gris : 5€
Moins de 18 ans : 5€

RSS Cinéma
RSS Scolaires
RSS Blog

(Quid des flux RSS ?)

EN DIRECT D'U-BLOG

Le blog des profondeurs...
(de champ)

30237
Et voilà, Vidéo en Poche c’est fini, le compteur s’arrête à 30237 copies vendues sans DRM sur clés USB ! À bientôt dans le cyberespace indépendant et surtout IRL dans les salles de cinéma :)Le 30 novembre à minuit, Vidéo en Poche a tiré sa révérence et retourne dans sa bouteille de ...

Stop Bolloré ! L'appel du collectif
Le collectif Stop Bolloré a vu le jour en décembre 2021 et rassemble des membres et des organisations de la société civile qui s’inquiètent de la concentration des médias et de l’édition en France et des dangers que cela représente pour la démocratie. Le projet du collectif, qui est poli...

Quiz des "trente dernières secondes" du n°101 au n°117
Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°101 au n°117   Samedi 17 avril Hier, fin N° 101. Juliette Binoche, 30 ans plus tard, et magnifique, dans un autre de ses plus beaux rôles. La musique, c’est le célébrissime Canon en ré majeur de Johann Pa...

Quiz des "trente dernières secondes" du n°51 au n°100
Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°51 au N°100 //////////////////////////////////////// Vendredi 26 février  Hier, fin N° 51. Saisissante. Tout comme l’est la séquence d’ouverture du film, qui montre la jungle s’enflammer sous les bombes a...

ABOUT KIM SOHEE

Écrit et réalisé par July JUNG - Corée du Sud 2022 2h15mn VOSTF - avec Kim Si-eun, Bae Doo-na, Song Yo-sep...

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

ABOUT KIM SOHEEQuelque part dans une petite ville de Corée du Sud, Sohee, une jeune lycéenne, est bien loin des préoccupations des adultes, leurs soucis pécuniaires et l’aliénation au travail qui en découle. Seule dans un studio de danse, face au grand miroir, elle répète inlassablement et avec une énergie farouche des mouvements de hip hop. Elle est libre, Sohee – son corps l’est tout autant et l’intransigeance de sa jeunesse lui interdit de se satisfaire des semblants d’égalité que le monde moderne lui concède au compte-goutte, tout en valorisant le sexisme et le mépris de classe. Elle est ainsi tout à fait incapable de ne pas réagir aux remarques méprisantes de garçons qui moquent bruyamment au restaurant les mimiques de sa copine, une apprentie « influenceuse » qui filme ses repas et en tire quelques revenus. Sohee n’hésite pas, insulte, menace, tient la dragée haute aux petits machos des dimanches. Mais cette liberté, le système éducatif coréen va décider de la brider. Comme toute lycéenne, à l’issue de sa scolarité, Sohee doit faire un stage en entreprise. Concrètement, comme partout, la (ou le) stagiaire sert avant tout de chair à canon économique, se voit sommée d’abattre un boulot conséquent pour pas cher – et de se taire pour obtenir les faveurs d’un chouette rapport de son « employeur ». L’enseignant référent de Sohee, d’abord obsédé par le pourcentage de placement de ses élèves, est fort peu regardant sur l’intérêt des stages, si bien que Sohee est parachutée dans un centre d’appels d’un fournisseur d’accès internet. Et voilà la jeune fille attachée huit heures par jour à un ordinateur et à ses écouteurs, contrainte d’adopter les techniques commerciales les moins reluisantes et de s’adapter à la pression managériale : éléments de langage pour abuser de la confiance des clients, concurrence effrénée organisée entre les employées, humiliations et pressions sur les moins performantes, contrats de travail biaisés… Tout est mis en œuvre pour ne pas payer leurs primes aux stagiaires, les amener à démissionner et les remplacer indéfiniment par d’autre, toujours plus malléables. Un arsenal de pratiques détestables qui rendent toute solidarité impossible entre les jeunes employées ou stagiaires et les fragilise à l’extrême, jusqu’au drame.

July Jung s’approprie avec About Kim Sohee, bouleversant, le combat que mène inlassablement Ken Loach depuis cinq décennies : raconter avec une puissante empathie le destin des gens de peu, pour mieux déconstruire, expliciter et dénoncer le rouleau compresseur implacable du libéralisme et sa capacité à détruire les vies. Son film est l’envers, beaucoup plus réaliste, du décor pimpant que nous survend le soft power terriblement efficace exporté par Séoul, à coups de blockbusters pétaradants (souvent épatants) et de groupes juvéniles de musique K-pop. Il dresse le panorama d’une société où tous les échelons (la famille, l’école, l’entreprise, la justice…) concourent à écraser la liberté individuelle pour la soumettre à l’aliénation au travail. Construit en deux parties, About Kim Sohee passe subrepticement du drame social à l’enquête policière – au cours de laquelle une détective intègre (magnifique Doona Bae, qui incarnait déjà une flic tourmentée dans Les Bonnes étoiles de Kore-Eda) va tenter de pointer du doigt les responsabilités du système.

On se gardera bien de ne reconnaître dans cette fresque sociale, intime et touchante, que la vision exotique d’un pays asiatique esclave de son productivisme. L’évolution de notre école, le saccage de notre système social, la libéralisation à marche forcée de l’économie et des services, tout nous entraîne vers le modèle très macron-compatible que dépeint magistralement la réalisatrice coréenne. Face à l’inéluctable, elle nous propose comme un mince espoir l’énergie désespérée d’une jeunesse à qui il ne reste plus qu’à renverser la table.