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30237
Et voilà, Vidéo en Poche c’est fini, le compteur s’arrête à 30237 copies vendues sans DRM sur clés USB ! À bientôt dans le cyberespace indépendant et surtout IRL dans les salles de cinéma :)Le 30 novembre à minuit, Vidéo en Poche a tiré sa révérence et retourne dans sa bouteille de ...

Stop Bolloré ! L'appel du collectif
Le collectif Stop Bolloré a vu le jour en décembre 2021 et rassemble des membres et des organisations de la société civile qui s’inquiètent de la concentration des médias et de l’édition en France et des dangers que cela représente pour la démocratie. Le projet du collectif, qui est poli...

Quiz des "trente dernières secondes" du n°101 au n°117
Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°101 au n°117   Samedi 17 avril Hier, fin N° 101. Juliette Binoche, 30 ans plus tard, et magnifique, dans un autre de ses plus beaux rôles. La musique, c’est le célébrissime Canon en ré majeur de Johann Pa...

Quiz des "trente dernières secondes" du n°51 au n°100
Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°51 au N°100 //////////////////////////////////////// Vendredi 26 février  Hier, fin N° 51. Saisissante. Tout comme l’est la séquence d’ouverture du film, qui montre la jungle s’enflammer sous les bombes a...

Mardi 30 MAI 2023 à 20h15

MAESTRA #11


Un mardi par mois, Maestra met à l’honneur une réalisatrice. Un cycle de programmation pour découvrir toute la richesse de notre matrimoine cinématographique mondial et mettre en lumière des cinéastes bien trop souvent effacées du récit cinéphilique.

SIMONE BARBÈS OU LA VERTU

Marie-Claude TREILHOU - France 1980 1h16mn - avec Ingrid Bourgoin, Martine Simonet, Michel Delahaye, Noël Simsolo... Scénario de Marie-Claude Treilhou et Michel Delahaye.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

SIMONE BARBÈS OU LA VERTUOù était donc passée Simone Barbès depuis tout ce temps ? Longtemps resté invisible, hormis sur de piètres copies pirates ou lors de rediffusions hasardeuses à la télévision, le premier long-métrage de Marie-Claude Treilhou, sorti dans l’indifférence en février 1980, refait surface à la faveur d’une splendide restauration, qui rend à sa dérive noctambule tout son lustre équivoque et étincelant. Coup de maître d’un culot et d’une grâce infinis, le film apparaît comme l’un des chefs-d’œuvre oubliés du cinéma français, trait d’union possible entre le cinéma populaire d’avant-guerre et les conquêtes libertaires d’après la Nouvelle Vague. Il incarnerait même, rétrospectivement, ce que le progressisme appelle aujourd’hui de ses vœux : un contre-modèle soucieux des marginalités, des diversités sexuelles, écrit et tourné dans un élan fou par une jeune femme combative d’à peine 30 ans. Trente-huit ans plus tard, il n’a rien perdu de son bouillonnement existentiel ni de sa verve sentimentale.

Simone Barbès (Ingrid Bourgoin, comète fulgurante des années 1980) est une tige brune et incandescente, à la gouaille incendière, figure discrète de la nuit parisienne qu’on accompagne le temps d’une seule soirée, découpée en trois actes. Elle est ouvreuse dans un cinéma porno du quartier Montparnasse, où transite tout un monde interlope. Postée dans le hall, aux côtés d’une collègue chagrine, elle décrit toujours le même manège d’accueil et d’orientation des clients, virant et revirant de bord entre sa chaise et le radiateur, faisant claquer ses hauts talons sur le sol. Clientèle masculine furtive, qui dépose au passage des fragments d’histoires personnelles, complaintes, plaisanteries, regrets ou confidences. Le tout entrecoupé par les battements des portes, laissant filtrer le funk humide et les gémissements outrés des bandes-son pornographiques. Simone se tient au carrefour de toutes ces trajectoires, héroïne insaisissable car traversée par les récits des autres et dissimulée en quelque sorte derrière eux.

Dans cet espace clos, Marie-Claude Treilhou construit avec une parfaite économie de moyens (changements d’axes précis et travellings raffinés) une éblouissante scénographie de circulations et de paroles télescopées. Le film fourmille de seconds rôles inoubliables, qui parviennent tous à exister le temps d’une scène, d’un passage, d’un mot lancé ou d’une gestuelle silencieuse. Théâtre des solitudes désirantes, qui se renverse, lors du deuxième acte, en son double féminin : une boîte lesbienne où Simone se rend après le travail, pour retrouver celle qu’elle aime, une serveuse qui la mène en bateau. Autour d’elle accoudée au bar, c’est une nouvelle ronde qui reprend de plus belle, entre les allées et venues des entraîneuses, les ritournelles tristes d’un orchestre de garçonnes décrépies, les performances d’une chanteuse punk-rock (Josse, du groupe 12°5) ou d’amazones s’affrontant sur un remix de Moussorgski… Simone patiente et voilà toute son histoire, banale et déchirante : elle se languit d’amour, elle attend, seule dans la nuit fluorescente. Et l’on n’aura pas besoin d’en savoir plus, pour surprendre dans son regard l’essentiel : le lent progrès de la lassitude et de la désillusion sur la soif de vivre.

(M. Macheret, Le Monde)