LA GAZETTE
(à télécharger au format PDF)

NOUS TROUVER
(et où trouver la gazette)

NOS TARIFS :
TARIF NORMAL : 7,50€
CARNET D'ABONNEMENT : 55€ (10 places, non nominatives, non limités dans le temps, et valables dans tous les Utopia)
Séance avant 13h : 5€
Moins de 18 ans : 5€

RSS Cinéma
RSS Scolaires
RSS Blog

(Quid des flux RSS ?)

EN DIRECT D'U-BLOG

Le blog des profondeurs...
(de champ)

La Paix, éternelle Utopie ?
Pas facile de décrypter le chaos du monde pour les spectateurs, plus ou moins lointains, que nous sommes, face aux faits tragiques qui nous submergent en avalanche via la presse, les réseaux sociaux, vraies ou fausses nouvelles… Et c’est dans ces moments-là que nous avons encore plus envie de croire...

LES SALLES UTOPIA SE METTENT AU VERT
Vous y croyez, vous, au bon sens qui voudrait que partir se bronzer les fesses à l’autre bout du monde  avec des avions Macron volant avec du bio kérozène made in France serait bon pour votre corps et la planète ? Cela ne ressemblerait-il pas étrangement au discours tenu il y a quelqu...

Justine Triet parle d’or
Il aura donc suffi de quelques mots, à peine, pour que la Ministre de la Culture, celui de l’Industrie, quelques maires et députés de la majorité, volent dans les plumes et la palme de Justine Triet, réalisatrice couronnée d’Anatomie d’une chute, sermonnant en substance : « ce n’est pas bi...

Rosmerta continue ! Vous connaissez l’histoire ? 
Depuis les débuts, et même avant, Utopia Avignon suit l’histoire de près ! Ça fait presque cinq ans qu’on vous en parle dans nos gazettes, à chaque rebondissement. Ce qu’il s’est passé depuis 2018 : réquisition citoyenne d’une école vétuste appartenant au diocèse, procès et appel...

Soutenez Utopia Palmer

ABOUT KIM SOHEE

Écrit et réalisé par July JUNG - Corée du Sud 2022 2h15 VOSTF - avec Kim Si-eun, Bae Doo-na, Song Yo-sep...

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

ABOUT KIM SOHEEQuelque part dans une petite ville de Corée du Sud, Sohee, une jeune lycéenne, est bien loin des préoccupations des adultes, leurs soucis pécuniaires et l’aliénation au travail qui en découle. Seule dans un studio de danse, face au grand miroir, elle répète inlassablement et avec une énergie farouche des mouvements de hip-hop. Elle est libre, Sohee – son corps l’est tout autant et l’intransigeance de sa jeunesse lui interdit de se satisfaire des semblants d’égalité que le monde moderne lui concède au compte-goutte, tout en valorisant le sexisme et le mépris de classe. Elle est ainsi tout à fait incapable de ne pas réagir aux remarques méprisantes de garçons qui moquent bruyamment au restaurant les mimiques de sa copine, une apprentie « influenceuse » qui filme ses repas et en tire quelques revenus. Sohee n’hésite pas, insulte, menace, tient la dragée haute aux petits machos des dimanches. Mais cette liberté, le système éducatif coréen va décider de la brider. Comme toute lycéenne, à l’issue de sa scolarité, Sohee doit faire un stage en entreprise. Concrètement, comme partout, la (ou le) stagiaire sert avant tout de chair à canon économique, se voit sommée d’abattre un boulot conséquent pour pas cher – et de se taire pour obtenir les faveurs d’un chouette rapport de son « employeur ». L’enseignant référent de Sohee, d’abord obsédé par le pourcentage de placement de ses élèves, est fort peu regardant sur l’intérêt des stages, si bien que Sohee est parachutée dans un centre d’appels d’un fournisseur d’accès internet. Et voilà la jeune fille attachée huit heures par jour à un ordinateur et à ses écouteurs, contrainte d’adopter les techniques commerciales les moins reluisantes et de s’adapter à la pression managériale : éléments de langage pour abuser de la confiance des clients, concurrence effrénée organisée entre les employées, humiliations et pressions sur les moins performantes, contrats de travail biaisés… Tout est mis en œuvre pour ne pas payer leurs primes aux stagiaires, les amener à démissionner et les remplacer indéfiniment par d’autre, toujours plus malléables. Un arsenal de pratiques détestables qui rendent toute solidarité impossible entre les jeunes employées ou stagiaires et les fragilise à l’extrême, jusqu’au drame.



July Jung s’approprie avec About Kim Sohee, bouleversant, le combat que mène inlassablement Ken Loach depuis cinq décennies : raconter avec une puissante empathie le destin des gens de peu, pour mieux déconstruire, expliciter et dénoncer le rouleau compresseur implacable du libéralisme et sa capacité à détruire les vies. Son film est l’envers, beaucoup plus réaliste, du décor pimpant que nous survend le soft power terriblement efficace exporté par Séoul, à coups de blockbusters pétaradants (souvent épatants) et de groupes juvéniles de musique K-pop. Il dresse le panorama d’une société où tous les échelons (la famille, l’école, l’entreprise, la justice…) concourent à écraser la liberté individuelle pour la soumettre à l’aliénation au travail. Construit en deux parties, About Kim Sohee passe subrepticement du drame social à l’enquête policière – au cours de laquelle une détective intègre (magnifique Doona Bae, qui incarnait déjà une flic tourmentée dans Les Bonnes étoiles de Kore-Eda) va tenter de pointer du doigt les responsabilités du système.

On se gardera bien de ne reconnaître dans cette fresque sociale, intime et touchante, que la vision exotique d’un pays asiatique esclave de son productivisme. L’évolution de notre école, le saccage de notre système social, la libéralisation à marche forcée de l’économie et des services, tout nous entraîne vers le modèle très macron-compatible que dépeint magistralement la réalisatrice coréenne. Face à l’inéluctable, elle nous propose comme un mince espoir l’énergie désespérée d’une jeunesse à qui il ne reste plus qu’à renverser la table.