LES SALLES UTOPIA SE METTENT AU VERT
Vous y croyez, vous, au bon sens qui voudrait que partir se bronzer les fesses à l’autre bout du monde avec des avions Macron volant avec du bio kérozène made in France serait bon pour votre corps et la planète ? Cela ne ressemblerait-il pas étrangement au discours tenu il y a quelqu...
Justine Triet parle d’or
Il aura donc suffi de quelques mots, à peine, pour que la Ministre de la Culture, celui de l’Industrie, quelques maires et députés de la majorité, volent dans les plumes et la palme de Justine Triet, réalisatrice couronnée d’Anatomie d’une chute, sermonnant en substance : « ce n’est pas bi...
Rosmerta continue ! Vous connaissez l’histoire ?
Depuis les débuts, et même avant, Utopia Avignon suit l’histoire de près ! Ça fait presque cinq ans qu’on vous en parle dans nos gazettes, à chaque rebondissement. Ce qu’il s’est passé depuis 2018 : réquisition citoyenne d’une école vétuste appartenant au diocèse, procès et appel...
La LDH, attaquée, appelle au combat pour les libertés et la démocratie
Le ministre de l’intérieur menace de lui supprimer ses subventions, la première ministre lui reproche ses « ambiguïtés », d’autres polémistes de droites extrêmes leur faisant écho.Si on peut reprocher quelque chose à la LDH, c’est la constance de ses positions et de ses combats. Créée en 1...
Écrit et réalisé par Aki KAURISMAKI - Finlande 2023 1h21 VOSTF - avec Alma Pöysti, Jussi Vatanen, Janne Hyytiäinen, Nuppu Koivu... Prix du Jury, Festival de Cannes 2023.
Du 20/09/23 au 17/10/23
« Même si j’ai acquis aujourd’hui une notoriété douteuse grâce à des films plutôt violents et inutiles, mon angoisse face à des guerres vaines et criminelles m’a enfin conduit à écrire une histoire sur ce qui pourrait offrir un avenir à l’humanité : le désir d’amour, la solidarité, le respect et l’espoir en l’autre, en la nature et dans tout ce qui est vivant ou mort et qui le mérite. Je tire au passage mon trop petit chapeau à Bresson, Ozu, et Chaplin, mes divinités domestiques. Je suis cependant le seul responsable de cet échec catastrophique. » Aki Kaurismäki
Il y a dans ces quelques lignes d’Aki Kaurismäki tout ce qu’on aime, tout ce qu’on admire dans ses films : sa manière de ne jamais se prendre au sérieux, son humour triste, son désespoir gai, sa foi viscérale dans l’humanité… et dans le cinéma. Toutes choses qu’on retrouve dans ce magnifique Les Feuilles mortes, ce nouveau film qu’on attendait avec une impatience inquiète – l’imprévisible Finlandais avait quand même annoncé sa « retraite », comme s’il avait décidé de garder ses inimitables visions du monde pour lui ! – depuis 2017 et le tout aussi magnifique De l’autre côté de l’espoir. Contrairement à ce qu’il galèje dans sa drolatique note d’intention, Kaurismäki n’a jamais réalisé « des films plutôt violents et inutiles » : depuis ses premières œuvres dans les années 1980, il n’a au contraire jamais cessé de distiller l’espoir à travers un humanisme communicatif, porté par des personnages du genre taiseux et souvent dépressifs mais qui savaient voir la lumière au bout du tunnel grâce à la rencontre, à l’amour ou l’amitié désintéressés.
Preuve que Kaurismäki a de la suite dans les idées, Les Feuilles mortes est pensé comme un codicille tardif à sa « trilogie du prolétariat », Shadows in paradise, Ariel et La Fille aux Allumettes tous trois réalisés au début de sa carrière et qui documentaient à leur manière la disparition programmée de la condition ouvrière en Finlande (et dans toute l’Europe occidentale). En 2023 il s’avère que, les prolétaires n’ayant pas été totalement éradiqués de la société finnoise (et de l’Europe occidentale), il y a encore des histoires d’eux à raconter. Et peut-être une occasion pour le cinéaste de leur rendre une forme d’hommage en leur offrant, par la magie du cinéma, la perspective d’un avenir – sinon radieux, du moins adouci par l’amour et la rédemption.
Ce pourrait être par exemple la réécriture du destin de Ansa et Holappa, deux quadragénaires solitaires qui se croisent par hasard une nuit à Helsinki – et qui, en toute logique, « la vie ayant une fâcheuse tendance à mettre des obstacles sur la route de ceux qui cherchent le bonheur », ne devraient jamais se revoir pour unir leurs solitudes. Les Feuilles mortes raconte ce cheminement long et tortueux vers le bonheur – car dans un destin chaplinesque, les numéros inscrits sur des bouts de papiers s’envolent, les rendez-vous se manquent, et l’incorrigible alcoolisme du garçon ne facilite pas les choses.
Le génie de Kaurismäki est de décrire un univers assez peu riant (le travail de chantier, le quotidien d’une caissière de supermarché, le tout rythmé par les nouvelles radiophoniques quotidiennes de la guerre en Ukraine), en le transfigurant avec son humour burlesque et sa poésie incomparable. En cela il ne fait que répéter inlassablement, depuis près de quatre décennies, le même motif qui consiste avant tout à porter un regard tendre et bienveillant sur l’humanité, à préférer les histoires de petites gens aux grandes démonstrations sociales. Comme s’il n’y avait pas pour lui de plus grande urgence que d’offrir du beau et du bonheur aux cabossés de la vie. Les Feuilles mortes remplit parfaitement sa mission, on lui en sait gré, en jouant en virtuose de petites citations cinéphiles qui ne font qu’ajouter à la poésie, rêveuse comme une strophe de Prévert, de l’ensemble. Une merveille.