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HINTERLAND

Stefan RUZOWITZKY - Autriche 2022 1h38mn VOSTF - Avec Murathan Muslu, Liv Lisa Fries, Max von der Groeben... Scénario de Stefan Ruzowitsky et Robert Buchschwenter.

(ATTENTION ! Cette page est une archive !)

HINTERLANDSur les flots désormais gris d’un fleuve autrefois célébré, sous les branches nues des forêts abattues soutenant un ciel noir pleurant l’empire perdu, vogue une triste péniche, brinquebalante et usée. A son bord, une poignée d’hommes déchus, pauvres soldats vaincus, brisés par la défaite et la captivité. Mais désormais le front est loin, la guerre passée, et les prisons fermées. Pour cette poignée de réprouvés, c’est le retour au Pays, à l’Arrière, comme on disait alors ici. Et là-bas : l’Hinterland. En Autriche. En 1920.

Pour Peter Perg et sa clique de gueules casséesss, le retour est amer : démobilisés, pour ne pas dire abandonnés à leur sort par une nation ruinée, leur seule perspective d’avenir se réduit à la soupe populaire ou à la délinquance. Sauf que Perg a un atout : la police viennoise, dont il était membre avant-guerre, et pour laquelle il va reprendre du service quand ses anciens camarades de tranchées commencent à se faire écharper par un mystérieux assassin. La Mort rôde dans la Ville torve, et Perg se lance à sa poursuite ; mais que peut un homme comme lui, rongé par les remords et les désillusions, face à un Mal si féroce, si sauvage, pire encore que celui qu’il croyait affronter, pendant toutes ces années, en vain ?

Hinterland, c’est avant tout ceci : une intrigue de polar archi-classique (l’ex-flic revenu de tout qui reprend du service pour une dernière affaire, un meurtrier insaisissable qui signe ses crimes de la façon la plus baroque possible, des policiers véreux couverts par une hiérarchie corrompue, une ville minée par la criminalité et l’impunité des puissants) mais néanmoins efficace, avec l’originalité d’avoir fait du personnage féminin principal, le docteur Körner, non pas une énième demoiselle en détresse mais au contraire une médecin légiste aussi chevronnée qu’opiniâtre. Cependant s’arrêter à l’intrigue serait passer à coté du film, car son propos dépasse largement ses enjeux. Plus encore que l’histoire, c’est l’ambiance irréelle dans laquelle il baigne qui retient l’attention. Tout y est distordu, poisseux, glauque, comme issu du cauchemar d’un aliéné. Peut-être est-ce celui de Perg, ou celui du tueur, précurseur d’un Mabuse encore à naître mais qui prophétise déjà la folie meurtrière qui va emporter l’Europe dans la décade suivante.

Et pour mettre en image sa vision hallucinée, Ruzowitzky a eu une idée aussi audacieuse que risquée : remettre au goût du jour l’esthétique expressionniste du Docteur Caligari, rien de moins ! Pari risqué, tant il implique du spectateur qu’il accepte de rentrer dans un monde faits d’angles impossibles, d’immeubles penchés défiant la gravité, de clairs-obscurs tranchants comme des rasoirs, de contre-sens géométriques, bref, de rentrer dans le jeu de l’Artificialité. Pari réussi néanmoins en ce qu’il parvient, comme son glorieux ancêtre, à transcender la représentation naturaliste de la réalité pour nous la montrer telle que la perçoivent les personnages : un monde malade et voué à la ruine, vu par des hommes malades et voués au malheur.
Empruntant autant à la littérature de l’époque (on pense parfois au Berlin Alexanderplatz de Döblin ou aux Réprouvés de Von Salomon) qu’aux chefs-d’œuvres du cinéma expressionniste allemand pour en nourrir sa trame, Hinterland fait la preuve qu’on peut signer un pur film de genre et dire quelque chose de pertinent sur notre époque, en ce qu’il souligne l’extrême dangerosité de la pulsion de mort cachée au plus profond de notre psyché quand elle est associée à un culte toxique de la virilité ; mélange explosif qui a précipité jadis notre continent dans l’abîme, et pourrait bien un jour l’y replonger encore.