Atelier d'écriture YAKSA 5 : à partir de tableaux de Magritte

Test du parapluie.

 

Les Vacances de HegelComment savoir si un parapluie est vraiment étanche ?

C’est très simple.

Prenez un verre d’eau. Oui un simple verre d’eau transparent. Un verre que vous pouvez trouver partout. Un verre sans identification spécifique.

Remplissez-le au 9/10 - c’est très important- d’eau du robinet :

- l’eau de ville, c’est bien connu, a un pouvoir bien plus prégnant que l’eau de source. Oui vous le saviez mais il est toujours bon de le rappeler. -

Ensuite choisissez LE parapluie. Là aussi pas d’erreur. Il faut un parapluie français sinon le test perd tout son sens. L’exception française assurément.

L parapluie idéal pour ce test reste un bon parapluie d’homme. Donc noir. Désolée !

Avec un manche en bois de chêne pour la stabilité. Il reste cher à l’achat.

Enfin positionnez le verre sur le parapluie une fois celui -ci ouvert en grand.

C’est très acrobatique. Si vous pouvez, faites-vous aider pour cette étape.

Et voilà !

Poussière d’étoiles.

 

Querelle des universauxQue sont ces blocs noirs ?

Pourquoi une étoile au centre ?

Est-ce une allégorie à la guerre de 14-18 avec les canons et les chevaux au front se dirigeant vers on ne sait où ?

Est-ce que le feuillage est un miroir ?

Que nous renvoie ce miroir ?

Que reste-il des feuillages ? Quel est le cinquième nom de la cinquième branche ?

Est-ce l’étoile juive ? Est-ce l’étoile du Nord ?

Est-ce la futilité du but qui induit le choix du papier qui constitue le centre ?

 


Petit manifeste pour les gens étourdis.

 

La clé des songes

Manger un œuf sous l’acacia,

Mettre ses plus beaux souliers pour admirer la lune,

Ne pas oublier son chapeau pour se promener sous la neige,

Allumer la bougie pour scruter le plafond

Recueillir l’eau de pluie après l’orage dans son verre d’eau pour le test du parapluie,

Penser à toujours apporter son marteau, en cas d’ennui mortel, il servira à casser des cailloux.

 

 


Déportation.

 

La réponse imprévue

Un jour un arbre en eu assez,

Assez de subir son sort d’arbre soumis aux autorités humaines,

Assez de pousser là où on lui avait enjoint de pousser,

Assez de grandir jusqu’à la hauteur indiquée, et pas davantage,

Assez d’être abattu sans sommation, sans cri, mais avec beaucoup de déchirement,

Assez d’être débité en planche,

Assez d’être utilisé pour bâtir des murs, former des planchers, façonner des portes et des fenêtres.

Alors une nuit, le chêne de la porte d’entrée voulut prendre la porte,

Il se mit à concentrer toute sa sève en son centre,

Peu à peu, il reprit sa somptueuse silhouette, tronc et branchage bien tranchés,

Pendant des heures, il poussa de toutes ses forces,

Et dans un effort ultime, sa silhouette se découpa du panneau.

C’est ainsi que dans la nuit, l’arbre au loin se déporta.


Une journée banale.

 

L'apparitionCe matin Albert s’est levé de son fauteuil. La tête dans les nuages, le regard sur l’horizon.

Son fusil se dresse à sa main gauche, cela tombe bien car Albert est gaucher.

Son cheval, il le sait, l’attend tranquillement à l’écurie, à l’est de son appartement.

La journée est tracée. Albert part à la chasse.

Mais que fait-il alors en costume de ville et pardessus, coiffé de son chapeau, chaussé de ses souliers vernis ?

Albert, aurais-tu perdu la tête dans quelque champ de bataille ?

Serais-tu à l’asile à ressasser tes idées noires ?

Bonne journée Albert, à demain.

 


Question existentielle.

 

Variante de la tristesse

Une poule sur un mur qui picore du pain dur…aucun intérêt.

Qui de la poule ou de l’œuf était avant ? Question bien connue

Mais une poule sur un mur qui pond un œuf et dans le même balancement va peut-être picorer un œuf à la coque qu’elle a elle-même pondu quelques minutes plus tôt ? Tout un programme pour la cruauté Humaine.

 

 

 

 


La petite maison du petit soldat.

 

 

Valeurs personnellesDans un grenier, j’ai déniché une maison miniature.

Une maison de poupée toute poussiéreuse que Grand-papa avait construite.

Sauf que celle-ci il l’avait faite pour son fils. Aussi ne s’agit-il pas d’une maison pour une poupée mais d’une maison un petit soldat de plomb.

Dans la chambre, tout en nuages légers pour faciliter les rêves, ou pour anticiper les nuits à la belle étoile, un petit lit double fait au carré comme il se doit à l’armée, un lit double pour envisager plus tard la vie de couple, pour penser à créer plus tard la famille qui doit préserver le nom, puis une armoire dont les portes font miroiter le vide existentiel de la pièce et un pouf. Pouf !

Enfin, un peigne, un blaireau et un verre tous les trois gigantesques.

Soit Grand-papa a eu des problèmes d’échelle avec ces éléments essentiels à la toilette du soldat, soit ce sont les siens. Son fils lui aura emprunté ces articles car Grand-papa ayant trépassé à trente-cinq ans sur le champ de bataille, il n’en avait plus l’usage.

L’enfant aura joué, chaque jour avec ces petits objets qui permettent de se souvenir.

Ces petits objets qui font que l’on est enfin grand, enfin un homme.

Qui vont penser : « Je me rase dont je suis. »

 


New-Packaging.

 

Chambre d'écoute

Ceci n’est pas une pomme qui, obstruant la fenêtre, coincée contre les quatre murs, prend tout l’espace une pièce d’une maison de Lilliputiens.

Ceci est le dernier visuel du nouvel emballage individuel pour commercialiser les pommes vertes à l’unité répondant au slogan : « La pomme à la maison ».

 

 

 

 

 


L’inconnue.

 

Recherche de l'absoluDans la douceur du couchant, l’arbre majestueux, quoique totalement dénudé, s’élève fièrement dans le paysage hivernal.

Le paysage est vide. Pourtant tout y est.

Qui a réalisé cette œuvre apaisante, aux senteurs de sérénité et de parfaite harmonie ?

Est-ce cette jeune-femme que l’on aperçoit de dos comme une ombre, vêtue d’un kimono de soie blanche ceint d’un large ruban rouge, agenouillée devant la table basse, la tête délicatement inclinée vers la droite, ses longs et épais cheveux noirs relevés en un lourd chignon épinglé de baguettes pourpre, dans un geste d’une élégance raffinée sa main droite relève un pinceau chinois gorgé d’encre, quel est le nom de cette délicate peintre ?

 


La révélation engloutie.

 

L'oasisIl a fallu chercher longtemps pour le trouver.

Maintes légendes en parlaient mais jusqu’à ce jour personne n’avait réussi à l’observer.

Hier soir, grâce à une tempête de sable aussi soudaine que violente, il s’élève enfin devant nous aux confins du désert. La colline qui le retient est si proche du ciel que l’arbre célèbre aux trois troncs sacrés s’élève haut, embrasse les nuages qui, avec délicatesse, préservent son feuillage verdoyant.

Pour célébrer cette occasion unique dans une vie, un banquet a été dressé au pied même de la révélation. Découpée en son tronc, elle en gardera à jamais l’empreinte.

 

 

 

 


Puzzle lumineux.

 

L'oasisLors du Procès à quatre mains,

Du mariage pictural,

La foule recouvre,

Dans la cage planète,

L’évanescence maritime,

De la laideur de la pomme.

 

Au pied du mur,

Le point de vue

Illumine le puzzle

Des amants tranchés

Par une métamorphose

Irrémédiable.

 

Au chant du bouquet,

Lors du repos de dos,

Le devant des amants,

Éclaire l’homme-oiseau,

Et la femme Thon.

Pendant que, derrière

 

Les amoureux, s’animent

Un prestidigitateur incognito

Et une robe adultérine.

Souvenir paisible

D’une pluie de baisers

En soirée.

 

Sophie G

Fin 2019, l’association Yaksa a installé ses quartiers d’hiver à Utopia Borderouge, pour y animer des ateliers d’écriture. A raison d’un samedi par mois, une poignée de graphomanes en herbe y ont fiévreusement noirci d’innombrables ramettes de papier, avant d’être stoppés dans leur élan par l’épidémie que l’on sait. En attendant de pouvoir renouer avec ces anciennes et chaleureuses pratiques, Yaksa poursuit évidemment son travail d’accompagnement en visioconférence - et nous a gentiment confié, pour que nous les partagions avec vous, quelques uns des textes nés dans l’effervescence de l’atelier à Utopia.